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Cheval barbe et fantasia

Date de création: 14-02-2023 18:49
Dernière mise à jour: 14-02-2023 18:49
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AGRICULTURE- ENQUETES ET REPORTAGES- CHEVAL BARBE ET FANTASIA

©  Kamel Bouslama/Repoters, lundi 13 février 2023
En Algérie, particulièrement, les origines de la fantasia remontent à la nuit des temps. C’est une véritable répétition d’un rituel guerrier pratiqué par nos ancêtres numides, en l’occurrence les cavaliers dans leur résistance face à l’armée romaine. Aujourd’hui, cette tradition équestre célèbre une fête religieuse (waàda), une fête civile ou alors le cheval lui-même, comme c’est le cas à Tiaret ou à M’doukal (W.de Batna) pour ne citer que ces deux localités. Et le cheval barbe, symbole de la fierté des populations des hautes plaines steppiques, jouit d’une place privilégiée dans la vie affective du bédouin algérien.
Connu pour être physiquement très endurant, sobre, frugal, résistant à toutes les variations climatiques et supportant sans peine toutes les privations, le cheval barbe quitta très tôt le berceau natal pour rayonner en Europe (Italie, Espagne et France) sous la selle de guerriers numides lesquels, mal connus à l’époque, étaient alors désignés par le nom de «Barbares» ; d’où l’appellation «barbe» qui fut aussi attribuée aux chevaux.
Pour en revenir au contexte propre à chaque époque historique, le cheval barbe était utilisé d’abord comme cheval de guerre par les Numides, puis par Jules César pour la guerre des Gaules, ensuite par les Berbères islamisés pour envahir l’Espagne. Plus tard, ce fut le cheval de dressage favori des rois de France. Il était utilisé par Louis XIII entre autres monarques. Ce fut aussi la monture des Spahis au XIXe siècle. Plus récemment, il a été utilisé par l’armée allemande -au cours de la Seconde Guerre mondiale- pour gagner Moscou avec des chevaux Barbes réquisitionnés en Tunisie par le général Rommel. Aujourd’hui, sa maniabilité en fait un cheval de fantasia par excellence.
L’une des plus anciennes races chevalines au monde
Il y a plusieurs théories sur l’origine de la race Barbe, très ancienne race chevaline originaire d’Afrique du Nord, qui tire son nom du mot «berbère». L’une d’entre elles dit que ce cheval descendrait d’un groupe de chevaux sauvages survivants de l’ère glaciaire. Des docteurs en paléontologie animale ont d’ailleurs démontré, entre 1987 et 2002, qu’il est vraisemblablement un cheval propre au nord de l’Afrique, issu d’un cheval sauvage domestiqué qui y vivait depuis plusieurs dizaines de milliers d’années.
Le cheval Barbe est, en effet, l’une des plus anciennes races non seulement d’Afrique du Nord, mais à l’échelle de toute la planète. Il était jusqu’à présent établi, d’une manière générale, qu’il était absent durant la préhistoire saharienne. Celui-ci n’aurait été introduit qu’au IIe millénaire av. J.- C. Néanmoins, des recherches menées en Algérie depuis peu établissent que des ossements d’espèce chevaline ont été trouvés dans des gisements datant de 4000 ans et plus. Dans ce cas, «Equus algericus» serait-il la souche sauvage du cheval Barbe ?», s’interroge à raison la préhistorienne Ginette Aumassip Kadri. (in «L’Algérie des premiers hommes»).
On notera qu’en Afrique du Nord, le cheval fait partie intégrante de la vie de l’homme dans toute son histoire. Des peintures rupestres représentant des chevaux ont, à ce titre, été mises au jour en Algérie. Cette origine lointaine est d’ailleurs renforcée par les gravures rupestres et par les monuments qui existent sur le territoire de l’Afrique du Nord, tout particulièrement sur le sol algérien.
Les inscriptions en question représentent la domestication d’un cheval ayant les caractéristiques morphologiques du cheval barbe actuel. Aujourd’hui, sa maniabilité en fait un cheval de fantasia par excellence.
La fantasia nous vient du fond des âges
Cette tradition équestre qui remonte loin dans le temps est alors soumise à un ensemble de comportements codifiés. L’ambiance, engendrée par les cavalcades bruyantes des groupes, les coups de feu retentissants et l’odeur de la poudre, est très particulière.
Dans l’Ouest et le Centre de l’Algérie, on peut encore assister à des fantasias de groupes qui s’opèrent avec au moins une dizaine de cavaliers qui galopent côte à côte et arrêtent leurs montures après la salve de coups de feu et ce, à quelques mètres à peine des spectateurs. A l’Est du pays, les cavalcades s’effectuent par vagues successives de deux ou trois cavaliers et la fantasia devient exhibition de haute voltige et de jeux d’adresse.
La beauté des costumes des cavaliers ainsi que le harnachement des chevaux procurent des sensations uniques. Pour témoigner des traditions hospitalières du peuple algérien, ces manifestations populaires se terminent toujours par des agapes joyeuses et conviviales, dont les méchouis et les couscous qui, très souvent, rivalisent de saveur et de finesse. Autour du cheval et comme pour l’honorer, se sont à ce jour formés de grands artisans selliers, tant leur amour à façonner des harnachements et des selles brodées de fil d’or et d’argent s’apparente à de l’art proprement dit.
Alors, pour tout dire, question qui tombe sous le sens : dans la mesure où ils sont indéniablement éligibles au classement par l’Unesco en tant qu’éléments de patrimoine immatériel de l’humanité, le cheval Barbe ainsi que la Fantasia qui perpétue sa renommée mondiale ne devraient-ils pas figurer précisément au sein de ce patrimoine universel ? N’est-il pas grand temps de procéder au dépôt de leur dossier pour classement à l’Unesco en tant que patrimoine algérien fondé, prouvé et ce, avant que d’autres pays -bénéficiant en cela de complicités ici et là- ne se l’approprient indûment au détriment de l’Algérie ?