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Ecole de Journalisme d'Alger (1964-1990)/Etude Chloé Nejma Rondeleux (I Bis /II)

Date de création: 09-09-2022 19:33
Dernière mise à jour: 09-09-2022 19:33
Lu: 363 fois


COMMUNICATION- ETUDES ET ANALYSES- ECOLE DE JOURNALISME D’ALGER (1964-1990)/ETUDE CHLOÉ NEJMA RONDELEUX (I bis /II)

 

Source: Édition électronique

URL : https://journals.openedition.org/anneemaghreb/10765

ISSN : 2109-9405

Éditeur

CNRS Éditions

Chloé Nejma Rondeleux, « L’École de journalisme d’Alger (1964-1990) : les défis d’une formation

professionnelle », L’Année du Maghreb [En ligne], 27 | 2022, mis en ligne le 30 juin 2022. URL : http://journals.openedition.org/anneemaghreb/10765

 

EXTRAIT (DEBUT ETUDE): À la fin de l’année 1964, une trentaine d’étudiants font leur rentrée dans la nouvelle  École nationale supérieure de journalisme (ENSJ), créée à Alger au début du mois  d’octobre. Parmi eux, une majorité d’hommes ainsi que trois femmes (Ahcène[1]Djaballah, 2020, p. 36), pour la plupart originaires d’Alger mais aussi d’autres grandes  villes du pays. Pour intégrer cette première promotion d’étudiants en journalisme, ils  ont d’abord été sélectionnés sur dossier puis ont réussir le concours d’entrée . C’est  ainsi qu’en ce mois de novembre 1964, les murs anciens et humides du 2 rue Jacques  Cartier, en plein centre-ville d’Alger, s’animent de l’agitation des établissements  universitaires. Même si les pièces sombres et exiguës du bâtiment – qui abrita à  l’époque coloniale le siège de la Loge maçonnique d’Alger 2 – sont loin d’être  opérationnelles comme salles de cours, cette ouverture est un événement. À l’échelle du Maghreb et plus largement du continent africain, l’École de journalisme  d’Alger constitue une expérience inédite à double titre . D’une part, elle représente un  projet pionnier de formation en journalisme, en précédant de plusieurs années la  naissance de l’Institut de presse et des sciences de l’information (IPSI) de Tunis en 1967,  celle de l’Institut supérieur de journalisme de Rabat en 1977 (Fourdan-Cilia et Paris,  1977, p. 982), mais aussi les créations en 1970 de l’École de journalisme pour les pays  africains de l’Université de Nairobi (Kenya) et de l’École supérieure internationale de

journalisme de Yaoundé (Cameroun) . D’autre part, à la différence d’un modèle

largement présent dans les pays dits « en voie de développement » à l’époque, l’ENSJ est  fondée sans l’appui d’un organisme étranger, notamment celui de la fondation privée  allemande Friedrich Naumann qui, empreinte d’une idéologie de libéralisme social, soutient à partir du milieu des années 1960 le développement de nombreux instituts de  presse dans les pays du « Tiers-Monde ».

La naissance de l’ENSJ s’inscrit dans un contexte de post-indépendance

particulièrement dynamique, au niveau politique, avec la multiplication d’initiatives  visant, après 132 ans de colonisation française, à doter l’Algérie de ses propres  institutions. Dans le domaine de l’éducation, plusieurs établissements d’enseignement  supérieur sont fondés au cours de l’année 1964, tels que l’École normale supérieure  (ENS) en avril 1964, l’École nationale d’administration (ENA) en juin 1964, ou encore le  Centre africain des hydrocarbures et des textiles (CAHT) en octobre 1964. Tous ces  instituts, à l’image de l’ENSJ, visent à former rapidement des diplômés capables  d’assurer le fonctionnement des infrastructures du pays après le départ massif des  Français au cours de l’année 1962. L’École de journalisme doit ainsi pallier un manque  de journalistes professionnels algériens, chargés d’animer les médias de langue  française et arabe qui ont été nationalisés ou créés au lendemain de l’indépendance. La  sortie de guerre a en effet vidé le secteur des médias et de l’information, monopolisé  par la presse coloniale dont les Algériens étaient largement exclus (Ihaddaden, 1983).  Par ailleurs, les rares journalistes algériens formés sur le tas en animant la presse  nationaliste clandestine, et qui dirigent les médias après l’indépendance, sont  rapidement appelés à occuper des postes de responsabilité politique dans  l’administration et la diplomatie (Ihaddaden, 2012, p. 97).

 En adéquation avec le projet tracé par le Front de libération nationale (FLN) lors du  Congrès de la Soummam de 1956, ces nouvelles infrastructures scolaires ont donc pour  mission de « donner au pays les cadres dont il a besoin » et « d’assurer le  développement de la pensée socialiste en tant qu’instrument de formation

idéologique » (Remili, 1980, p. 45). L’ENSJ a pour rôle de former « des cadres supérieurs  dans le domaine de l’information, de la presse et de l’administration publique »  destinés à participer à « l’édification d’une information spécifiquement algérienne ».  Cette définition, contenue dans la brochure de présentation de l’École éditée par le  ministère de l’Éducation nationale et l’Université d’Alger, reflète la vision très  bureaucratique et idéologique du rôle du journaliste défendue par les dirigeants  politiques. Dans un régime de parti unique (Leca et Vatin, 1975, p. 75) l’autorité  politique contrôle l’ensemble des médias, le journaliste endosse aussi le rôle de  fonctionnaire, de militant et de porte-parole du parti, du gouvernement et de la  Révolution, comme le répètent les discours des responsables politiques et les textes  législatifs encadrant la profession (Brahimi, 1987, p. 195)