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Roman Anouar Benmalek -"Fils de Shéol"

Date de création: 28-05-2021 16:25
Dernière mise à jour: 28-05-2021 16:25
Lu: 763 fois


HISTOIRE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN ANOUAR BENMALEK FILS DE SHÉOL »

Fils du Shéol. Roman de Anouar Benmalek. Casbah Editions Alger 2015 (Calmann-Lévy,Paris 2015) , 409 pages, 950 dinars

C’est l’histoire du jeune Karl,  allemand , embarqué dans un fourgon à bestiaux à destination des usines de mort nazies, installées en Pologne . Parce que Juif ! Il est gazé comme des millions d’autres.

Il est « condamné » , depuis l’ « étrange séjour des morts », le « Shéol », à regarder vivre, souffrir  et mourir les siens : Son père, devenu Sonderkommando (chargé de l’incinération des prisonniers) ; sa mère , Elisa, fille d’Alger, amoureuse folle de la musique andalouse, le « paradis perdu » des Arabes et des Juifs,lumineuse et grande battante, elle aussi gazée dans le même camp parce que juive  ; le papy (« heureusement » décédé de mort naturelle  mais enterré à la va-vite). Lui, c’est Ludwig qui, un siècle auparavant,  a servi dans l’armée allemande du Sud-Ouest africain (actuelle Namibie, totalement colonisée , martyrisée, massacrée, avec des centres de « concentration » identiques ,ou pires,  à ceux des descendants nazis ) et qui était resté « possédé » par le continent noir, en raison d’un immense amour (le pire des crimes !) pour une « indigène », Hitjeverwe,  qui allait lui donner un enfant, lui aussi mort sous les coups des occupants …..

L’enfant, Karl,  et tous les autres, chacun dans son univers , remontent le temps, essayant – vainement, tant la réalité est effroyablement et incroyablement vraie -  de comprendre l’évolution du mal à travers le massacre, par un même pays,  de deux populations : les Héreros de Namibie et, plus tard, les Juifs. Et, aussi,  de revivre, ne serait-ce que mentalement, le temps passé avec ses joies et , surtout ses peines, ses succès et surtout ses ratages, ses espoirs et surtout ses regrets.

L’Auteur :Il est né à Casablanca en 1956. Ecrivain, poète, journaliste, enseignant universitaire, un des fondateurs du Comité algérien contre la torture, plusieurs fois récompensé, auteur d’un grand nombre d’ouvrages des romans (dont « Ô Maria » en 2006, « L’Amour Loup » en 2014, «  Chroniques de l’Algérie amère » en 2011…..), de la poésie (en 1984 et 2005), des nouvelles….

Avis :Ça ne se lit pas, ça s’ingurgite. Pour moi,   un chef d’œuvre et, déjà, le livre de l’année.Une histoire lointaine, qui remonte à bien longtemps, mais une histoire qui concerne toute l’humanité…..Une humanité qui bascule , toujours, si facilement , dans l’inhumanité et l’horreur.L’histoire bégaie : Avant-hier , les Héreros de Namibie, hier les Juifs !Aiujourd’hui, les Palestiniens et les Sahraouis….A qui le tour?

Interdit de lire aux moins de dix-huit ans, tant l’horreur de l’inhumanité prussienne puis nazie, est décrite avec force détails et vous noue les tripes, avec une envie monstre de vomir .On aurait aimé tellement voir l’auteur, ou un autre, écrire un livre de même qualité sur les méfaits du colonialisme français en Algérie .

Citations : « Vivre est un privilège dont il ne faut pas trop abuser » (p 73), « La vie comme les bouteilles, ça se vide rapidement » (p 99), « La honte née de l’acceptation de la lâcheté était un mal « facilement » supportable au regard des conséquences (…) occasionnées par son refus »  (p 253), «  Il n’y a rien de plus sale que la mort. La mort, oui, c’est la saleté suprême. Par rapport à elle, tout est beau, même la pire des laideurs » (p 275), « Que les femmes ont bêtes ! Même au sein du malheur, elles s’arrangent pour se créer encore plus de malheur » ( 368), « Les noms étaient des crochets douloureux inventés par les hommes pour persuader les nouveaux venus sur terre qu’ils sont uniques et que leur vie vaut d’être vécue » (p 381)