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Récit Nadir Marouf- "De mémoire d'homme.Une vie, deux combats"

Date de création: 04-05-2021 10:18
Dernière mise à jour: 04-05-2021 10:18
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CULTURE- BIBLIOTHÈQUE D’ALMANACH- RÉCIT NADIR MAROUF- « DE MÉMOIRE D’HOMME.UNE VIE,DEUX COMBATS »

 De mémoire d’homme.Une vie, deux combats .Récit et Essai de Nadir Marouf (Préface de Karima Lazali). Editions Frantz Fanon, Boumerdès 2020, 189 pages, 600 dinars

Un récit de vie….de plusieurs vies…..accompagné de leçons de vie : la naissance à Tlemcen, garçon unique et aîné (quoi de mieux pour être le « chouchou » d’un papa au « caractère marginal …. de la race des génies tout en étant quasi-analphabète »)  l’école, lycée….en France (Paris, en troisième au Lycée Henri IV,  en juin 1956…pour quelques mois seulement,   tout en découvrant le monde artistique et des arts lyriques dont « La Traviata », « Le lac des cygnes », « La Traviata »….. l’oncle étant machiniste à l’Opéra Garnier , ainsi que les belles lettres, ayant eu accès à la bibliothèque du fils aîné de Charles Péguy, un ami l’oncle) et en Algérie….puis, à l’âge de 17 ans, en mai 57,  le maquis, rejoignant ainsi les combattants pour l’indépendance du pays. Il pensait être envoyé en Yougoslavie pour terminer ses études (comme promis) et il se retrouve « katib » d’un chef de zone ( région 4)….plus que sévère. Il est vrai qu’en ces temps-là, on n’appréciait pas trop (pas partout heureusement ! ) les « intellectuels  »

Fait prisonnier, échappant de justesse à une exécution collective, jeune administrateur, à l’Indépendance, au Plan…..il termine ses études  en Algérie puis en France….Un gros lot de diplômes et d’ouvrages……et une expérience professionnelle, sur le terrain, dans les labos de recherche universitaire et dans les amphis , de plus d’un demi-siècle .

Mais, cette fois-ci, une exception :S’agissant d’ « étaler » son vécu, le personnage devant laisser la place à la personne , à l’individu nu, dit-il ; ayant en lui la tendance , par déformation professionnelle , « à intellectualiser et à se fendre de concepts »  (ce qu’il trouve fort handicapant quand il s’agit d’ « enlever le masque », même s’il a « la plume facile » ) , il nous livre une « confession » qui nous fait « participer »  pleinement (je parle ici de sa presque génération) à son parcours ; un parcours racontée avec humilité.  Et, pour compléter le récit, il se dévoile encore plus à travers une « grande interview » réalisée en 2017 (alors professeur contractuel à l’université de Tlemcen, au terme de sa double retraite , algérienne et française) par deux « jeunes collègues » effectuant une travail sur la vie et l’œuvre de celui qu’ils qualifiaient de « doyen des sociologues algériens ». 21 questions, 21 réponses…..qui balaye  tout le (large) champ de la sociologie, de l’anthropologie…et de la politique .Celles d’hier, celles d’aujourd’hui….et de demain. Une interview complétée par une postface, plus en phase avec l’actualité car synthèse de quelques extraits d’articles remaniés et publiés dans la presse écrite nationale…..depuis 2018/2019. Et pour finir, « quelques propositions » sur la planification, la régionalisation, la politique de l’enseignement supérieur et la recherche …..Des pistes «  jetées en pâture qui pourrait s’insérer dans le renouveau constitutionnel, si tant est qu’il soit de nature à s’adapter sans relâche aux injonctions de l’ordre juste et de l’équité »

L’Auteur : Né à Tlemcen (1940), moudjahid, sociologue et anthropologue. Enseignant universitaire , en Algérie et à l’ étranger. Auteur d’une trentaine d’ouvrages

Table des matières : Préface/ Avant-propos/ Récits/ Epilogue :Les dégâts collatéraux : pertes et profits….. L’autre combat ou l’âge de  maturité /La  grande interview /Postface

Extraits : « Le syndrome du garçon unique doublé du statut d’aîné a toujours été indéchiffrable. Toujours est-il que Mohammed n’a jamais agi par motivation exclusivement politique » (p 65), « Avec le recul, un regard psychanalytique tendrait à montrer, sous réserve d’inventaire, que la quête d’indépendance répondait moins à la lutte anticoloniale, à l’aspiration socialiste et autres mots d’ordre canoniques, qu’au « droit à la ville » (p73), « Toutes les études que nous avions faites avant (dans les années 60-70) étaient à la remorque du temps étatique (….).Donc c’était l’Etat qui décidait pour nous de ce qui est important ou pas. L’Etat était (et est encore d’une certaine manière) la catégorie inaugural du SENS » (p133), « Le grand rendez-vous que nous avons raté est de n’avoir pas renforcé un acquis immense dont disposait l’Algérie, celui des établissements franco-musulmans, qui ont produit des compétences dans chacune des deux langues » (p136)

Avis : Conseillé aux chercheurs, anciens et futurs……mais aussi à tous les universitaires

Citations « Penser l’Histoire d’abord et avant tout comme responsabilité revient à mettre en son centre la force et l’inventivité du dynamisme humain » (Karima Lazali, p 14), « La distance géographique n’est pas forcément consubstantielle de la distance culturelle » (p 75), « L’univers carcéral n’affecte pas que la psyché. Son impact sur le corps peut agir à retardement au moment où on ne s’y attend pas »  (p 108) , « Il faut que les jeunes générations sachent, en effet, que la guerre d’indépendance  n’a pas été une sinécure, sauf qu’elle n’est plus perceptible aujourd’hui qu’à travers les rentiers de la légitimité historique » (p110), « On n’écrit pas de la même manière à 30, 40 ou à 70 ans parce qu’on n’a pas la même acuité du regard sur les choses » (p137), « En voulant, sous couvert d’une vision autocentrée, nous soustraire à l’européocentrisme, voire à l’occidentalo-centrisme,  nous fabriquons un danger mortel pour nous et pour les générations montantes (…..) C’est vous dire que le lieu où on produit la connaissance importe peu, c’est pour cela qu’il ne faudrait pas qu’on ait ce rapport complexé au reste du monde »  (p149), « Le pouvoir politique est sur la défensive et gère l’existant. Le pouvoir politique actuellement est un « goal » dans un match de foot, il essaie d’éviter de se faire marquer des buts » (p156), « La mosquée est là pour servir de thérapie de groupe, mais son effet s’arrête bien souvent à la sortie » (p 161)