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Récit Belkacem Ahcene Djaballah -" Dir'Com et journaliste, un parcours du combattant"....."

Date de création: 01-01-2021 17:56
Dernière mise à jour: 01-01-2021 17:56
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COMMUNICATION- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- RECIT BELKACEM AHCENE DJABALLAH- «  DIR’COM ET JOURNALISTE, UN PARCOURS DU COMBATTANT »

©Lilia Zaimi/Reporters, jeudi 30 décembre 2020

«Dir’Com et journaliste, un parcours du combattant» est le dernier ouvrage qu’a publié récemment l’expert en communication Belkacem Ahcène-Djaballah aux éditions « El Qobia ». Un livre-mémoire qui témoigne de l’expérience de l’auteur en tant que responsable des grandes institutions nationales de l’information, de la communication et de la publicité, à savoir l’APS et l’Anep. Dans cet entretien, M. Ahcène Djaballah nous parle des raisons de cette publication, de ses regrets, ainsi que du regard qu’il porte sur les institutions d’information en ce moment. Entretien.

Reporters : Vous venez de publier un livre dans lequel vous retracez une partie de votre parcours personnel et professionnel. Pourquoi ce livre maintenant ?
Belkacem Ahcène-Djaballah : C’est une sorte de conclusion, peut-être incomplète, peut-être non définitive, d’un parcours professionnel et personnel parsemé de satisfactions, mais aussi de difficultés. C’est d’ailleurs ce qui a donné une vie tout de même bien pleine quels que soient les «vides» possibles et les ratages. L’essentiel, c’est (presque), en fin de vie, de se sentir en état d’équilibre et, surtout d’avoir, face aux «autres», ceux d’hier et ceux d’aujourd’hui, une conscience tranquille et apaisée. Ce qui permet, sans être grand philosophe, de vivre sa société sans complexes et sans rancunes et avec, toujours en tous lieux et en tous temps, l’espoir d’un «mieux-être».
C’est aussi, et peut-être c’est mon plus grand défaut, le souci de laisser une «trace» dans notre «micro-société de la presse et de la communication», afin que ceux qui viendront sachent qu’avant eux, il y a eu, dans ce pays, d’autres travailleurs de la communication et de la presse qui ont produit (bien et/ou mal), qui ont souffert, qui ont été malmenés, qui ont été tués, qui ont réussi des exploits, qui… C’est, enfin, une sorte de «testament» destiné à ma famille, à ma descendance, à ma tribu, à ma région… Car, il n’y a pas que les «politiques qui ont participé à la construction du pays qui ont le droit (et l’obligation) de laisser des traces mémorielles.
A noter que sur le plan de l’écriture de l’histoire, la grande et la petite, je suis un fervent partisan de l’histoire événementielle, d’une histoire écrite à partir de la base et non à partir des sommets… Comme j’ai toujours été un partisan du journalisme de proximité, presque «fait-diversier». Ne dit-on pas que ce sont les petites rivières qui font les grands fleuves.

Dans le monde universitaire et institutionnel relatif aux domaines de l’information et de la communication, on connaît la longévité et la richesse de votre parcours sur lequel vous avez beaucoup à dire. Pourquoi avoir choisi de faire dans la brièveté et d’omettre certaines séquences de votre trajectoire professionnelle ?
Pour ce qui concerne la brièveté, cela tient beaucoup plus à mon style d’écriture et à mon caractère. Aller à l’essentiel et ne pas tomber dans le discours long, creux et ennuyeux. De plus, avant de «découvrir» les autres, il faut d’abord se présenter. Conclusion : précision, si possible, et concision, les deux mamelles du journalisme !

Vous étiez responsable dans les secteurs de l’information et de la communication à des périodes cruciales de l’Histoire de l’Algérie, notamment dans les années 1988-89, au moment du basculement vers le pluralisme, ou encore pendant la décennie noire. Comment avez-vous vécu ces moments ?
J’ai eu la chance de connaître à peu près, in situ, les plus grands bouleversements politiques et culturels en Algérie et ailleurs. Durant ma prime jeunesse, la guerre de libération nationale, la grève des étudiants et des lycéens de 1956, les manifestations de décembre 1958, la joie de l’Indépendance -j’étais affecté, à Annaba, à un bureau de vote lors du référendum, le rock’n roll et le twist, Abdelhalim, Elvis Presley, Françoise Hardy et Hassan El Annabi, le volontariat, le 19 juin 1965… et Cavaignac, le mouvement hippie à San Francisco, Joan Baez et Bob Dylan, l’armée durant 45 jours pour aller «combattre contre le sionisme», mai 1968 à Paris, l’Armée encore avec le Service national, les 3 R de Boumediène, la Révolution agraire, Octobre 88, la décennie rouge (hélas), le Bouteflikisme (hélas), le hirak… Je dis la chance, car, en définitive, je m’en suis sorti à bon compte –malgré quelques problèmes personnels douloureux – alors que des amis et des camarades ne l’ont pas eu ou ne l’ont eu qu’en petite partie.
Pour être franc, ce qui me rend le plus heureux, c’est de voir, à partir de 1988 – en dehors de tous les dérapages qui ont suivi à un moment ou à un autre – la démocratie pluraliste et républicaine s’installer, ainsi d’ailleurs qu’un certain libéralisme qui, malgré les déviations et les manques, reste assez social. Dommage, les comportements de bien des décideurs n’ont pas évolué dans le bon sens et les règlements restent encore trop «bureaucratisés».

Personnellement, en lisant votre ouvrage, je m’attendais à ce que vous rendiez publics quelques secrets ou quelques indications sur ce qui s’est passé dans l’ombre de toutes ces époques décisives que vous avez vécues comme acteur et témoin, mais là, j’ai l’impression que vous avez évité d’aller dans la confidence. Pourquoi ?
Je voulais surtout insister sur mon parcours professionnel technique comme si, inconsciemment, je voulais rester scolaire et pédagogue et continuer à m’adresser aux futurs journalistes et communicants. Cela ne m’a pas empêché, cependant, et c’est mon style, de «piquer» ça et là la vie politique, sans trop m’appesantir, bien sûr, sur des moments que vous dites décisifs ayant marqué la vie politique du pays et de sa gouvernance, alors que j’étais aux premières loges. Encore faut-il avouer que, technocrate (non bureaucrate) avant tout, comme beaucoup d’autres cadres, on était bien plus inondés par les tâches quotidiennes destinées à faire marcher la «baraque» que de passer son temps à «écouter» aux portes ou à manigancer on ne sait quel «coup» pour s’assurer un «avenir radieux».

A l’âge de la retraite, regrettez-vous, aujourd’hui, certaines choses de votre passé professionnel ?
Peut-être le fait d’avoir été, lorsque je suis devenu gestionnaire, un peu trop sévère dans la gestion des gens du terrain et d’avoir été parfois trop souple avec les gens des bureaux… et les syndicalistes. Il est vrai que la responsabilité économique – je parle d’une époque que les moins de 50-60 ans ne peuvent pas connaître – vous oblige, bien souvent, sinon toujours, à être rigoureux en matière de gestion. Mais, certainement par narcissisme, j’ai toujours eu cette volonté de réussir sans dommages. Cela, bien sûr, n’a pas été du goût de certains, mais la bonne marche des services, la satisfaction des travailleurs et celle du public, quand il s’agit de la gestion de presse ont suffi amplement à mon égo.

Sur l’Anep, que vous avez dirigée dans les années 1984-1985, vous écrivez : «la gestion du secteur de l’information en Algérie se fait au gré des humeurs… des calculs et des intérêts». Pourquoi cet aveu et à quoi il correspondait il y a plus de 30 ans ? De tels propos sont-ils encore valables aujourd’hui ?
Tout monopole exclusif comme celui de l’Anep durant les années 1960-70 et 80 était indubitablement lié aux gouvernants (pouvoir réel ou pouvoir profond) de l’heure et aux intérêts politiques et… souvent économiques, les leurs et ceux du pays parfois, sinon souvent, confondus. Pourquoi cet aveu ? Parce que cela n’a pas grandement changé malgré une plus grande transparence et la liberté d’expression… «L’intérêt supérieur» de l’Etat, chacun le conjuguant à sa façon, a remplacé les calculs et les intérêts des groupes et des individus. Encore qu’avec le bouteflikisme «flamboyant», on est allé de mal en pis, on est tombé dans le «monopole au profit du clan».

Quid de la gestion et du fonctionnement, aujourd’hui, des entreprises dont vous aviez été le responsable à un moment donné ?
Les contextes ont changé, les objectifs aussi, de même que les mentalités et les comportements. Souvent en bien, parfois en bien moins. Hélas, à mon humble avis, la gouvernance économique des entreprises dites publiques n’a pas grandement évolué. Avant, tout était «clair» : par l’Etat et pour l’Etat ! Peut-être qu’avec l’ouverture économique, à partir des années 1990, globalement, la peur de la «concurrence» a entraîné une sorte de repli sur soi et le règne d’une gestion encore plus contrôlée, plus orientée.

Quel regard portez-vous sur le secteur de l’information dans notre pays ? Qu’est-ce qui a changé et qu’y a-t-il d’invariant ?
C’est un secteur qui a grandement changé en quantité et en qualité. Malheureusement, d’un côté, l’Etat reste encore trop présent à travers ses textes réglementaires – assez sévères ou incomplets ou trop compliqués lorsqu’ils existent – quasi inexistants dans un paysage et une demande sociale qui ont beaucoup changé et un secteur (tous médias confondus) largement inorganisé qui a été géré bien plus comme une épicerie que comme une entreprise. J’allais oublier les corps professionnels totalement absents, sauf au niveau des réseaux sociaux. Ce qui nourrit l’opinion publique jusqu’à l’indigestion, mais pas des estomacs.

Biographie de l’auteur
Diplômé de l’Ecole nationale supérieure de journalisme de l’Université d’Alger (1re promotion 1967), diplômé de l’Institut français de presse de l’Université de Paris 2, docteur en sciences de l’information de l’Université de Paris-2, Belkacem Ahcène-Djaballah a assumé diverses responsabilités dans le secteur de la Communication : Directeur de documentation et des publications au ministère de l’Information (et de la Culture), Directeur général de l’Anep, Directeur général de l’APS, membre du Conseil supérieur de l’information, chargé de mission, Directeur de l’information à la présidence de la République 1994-99. Professeur associé à la faculté des sciences politiques et de l’information d’Alger, où il a introduit et puis assumé très longtemps un cours sur l’économie de l’information, et à l’Ecole nationale d’administration ‘section diplomatie. Il est désormais retraité.
Aujourd’hui, journaliste-chroniqueur indépendant et consultant en communication, il a été récemment Professeur associé à l’Ecole supérieure de journalisme et des sciences de l’information d’Alger/Ben Aknoun. Il a déjà publié plusieurs ouvrages sur les médias.

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«Dir’Com et journaliste, un parcours du combattant» – Prix : 800 DA