Nom d'utilisateur:
Mot de passe:

Se souvenir de moi

S'inscrire
Recherche:

Nassima Hablal

Date de création: 12-11-2020 18:52
Dernière mise à jour: 12-11-2020 18:52
Lu: 668 fois


HISTOIRE- PERSONNALITES- NASSIMA HABLAL

 

© El Watan , 16-06-2005

 

Ancienne secretaire de abbane ramdane, décédée le 14 mai 2013 à l'âge de 85 ans. :

" C'est mon voisin M. Ourif, originaire de Laghouat, qui m'a amenée au militantisme,

au début des années 1940, suite aux tragiques massacres de mai 1945, particulièrement à Kherrata où quatre jeunes avaient été tués. leurs corps en putréfaction ont été exposés sur la voie publique durant une semaine, avec interdiction de leur donner une sépulture.. ça m'a profondément révolté.

Pour des raisons sociales évidentes, j'ai commencé à travailler. Mais parallèlement, je fréquentais un groupe d'étudiants de mon âge. C'est avec eux que j'ai commencé à militer.

La première cellule où j'ai activé se trouvait à la Casbah. Nous ramassions de l'argent pour le parti auprès des familles aisées bien sûr. Nous vendions le journal du parti et nous faisions tout un travail de propagande parmi les femmes.

Je travaillait au gouvernement généralle GG». j'ai commencé à activer dans un réseau composé d'hommes avec notamment Mustapha Ben Mohamed. Je recevais chez moi des militants qui, lorsqu'il y avait un congrès ou une réunion qui se déroulait à Alger, y venaient clandestinement, étant interdits de séjour.

Le 1er novembre 1954 arrive. La joie était immense comme l'étaient les espoirs que ce jour a suscités.

j'attendais qu'on m'envoie un signal. Je m'étais rendue à Bucarest pour le festival mondial de la jeunesses car chaque année je voyageais pour oublier un moment le racisme ordinaire que nous subissions. Un jeune homme m'a un jour abordée et m'a demandé si j'étais bien Nassima Hablal. « Oui, lui ai-je répondu. - je voudrais discuter avec toi », m'a-t-il dit. Je lui ai laissé mes coordonnées à Alger et l'ai invité à me contacter. Le jeune homme en question était Mohamed Sahnoun, futur diplomate. Il était avec le groupe de Amara Rachid.

De retour au pays, avec des français et des chrétiens de gauche qui faisaient un travail social dans les bidonvilles je passais mes week-ends dans les quartiers défavorisés à soigner, vacciner, alphabétiser....

La révolution venait de débuter, ses moyens étaient limités. Des militants avaient été libérés, dont Abane. A sa libération, il vivra un autre drame, familial celui-là. En effet, en arrivant chez lui, sa mère dans le jardin était occupée à biner. On l'appelle et on lui dit : « Viens tu as un invité. » Lorsqu'elle s'est trouvée devant son fils, la surprise de le voir a été telle qu'elle a fait une attaque qui l'a rendue hémiplégique à vie.

Krim Belkacem et Ouamrane le contactent et lui confient l'organisation d'Alger 1ère zone autonome. Il s'est installé chez moi, a proximité du Jardin d'essais, dans la villa la Gloriette pour un an ou plus, jusqu'à ma première arrestation.

Nous somme fin 1955, On n'avait rien du tout. Je tapais des tracts chez moi puis je me suis permis d'aller faire les tirages chez les pères blancs en face de Sidi Abderrahmane avec Amara Rachid. Ils ignoraient bien sûr le contenu des documents. Mais il y a eu comme d'habitude « une âme charitable » qui nous a dénoncés.

Depuis 1955, J'étais la secrétaire de Abane, puis après le Congrès de la Soummam, la secrétaire du comité d'exécution et de coordination (CCE).

Lorsque Amara Rachid se rendait chez Abbas en voiture, il a été repéré et arrêté. Auparavant, Abane voulait l'envoyer en mission en Egypte et je lui ai donné mon adresse pour son passeport dont il a gardé l'enveloppe. Ils n'ont pas tardé à débarquer chez moi, pour m'embarquer. J'ai donc été appréhendée. Préparée à l'éventualité, je n'ai pas parlé. Ils m'ont interrogée au commissariat. Puis ils m'ont déférée à la prison de Serkadji où j'ai été isolée. J'avais un oncle qui était avocat, Me Bensmaia, qui connaissait le bâtonnier Morino. Il est intervenu.

Quand je suis allée à l'UGTA au secrétariat national avec Aïssat Idir, je faisais la liaison entre Abane et lui, car ils devaient se voir le moins possible.

J'étais permanente au secrétariat national de L'UGTA. A ce moment-là, on a eu notre premier journal El Moudjahid. Il faisait à l'époque environ 70 feuillets. J'assurais la frappe et le tirage .Le journal était expédié aux quatre coins du pays dans des caisses censées contenir des paquets de café.

Il y avait l'éditorial qui était écrit soit par Abane, soit par Larbi Ben M'hidi, soit Saâd Dahlab ou d'autres cadres. Et puis il y avait les faits des maquis, les nouvelles qui venaient de partout et puis les positions politiques et diplomatiques du FLN. Je tapais également le journal de l'UGTA, L'Ouvrier algérien. Nous étions continuellement contrôlés par la police. Parce que à l'UGTA on y fabriquait des bombes, on y amenait le matériel et les matières explosives pour leur confection.

Ma 2ème arrestation c'était le 21 février 1957. Je suis restée dans les centres de torture jusqu'au mois d'avril. J'en ai fait sept.J'ai d'abord fait la caserne des bérets bleus à Hussein Dey. C'est là que le supplice a commencé. De 11h jusqu'à 6h, j'étais pendue au plafond la tête en bas, l'électricité, les électrodes, les bidons d'eau, toute la panoplie qu'ils avaient en tête. Mes bras étaient paralysés... des nerfs sectionnés des muscles distendus tuméfiée terrifiée et cette atroce douleur qui tenaillait mon dos. La séance a duré six heures. Ils m'ont massacrée. Ensuite, ils ont commencé à m'interroger. J'ai alors déliré. Je n'avais pas parlé de Abane. J'ai en revanche parlé de Amara Rachid que je savais mort au maquis depuis quelques mois déjà. Toute la nuit, à côté, j'ai entendu torturer des hommes. Le lendemain matin, ils m'ont emmenée en voiture. Ils ont essayé la méthode douce en disant : « Si tu parles nous allons t'envoyer en Espagne et personne ne saura que tu as dit quelque chose. » Au retour de « la balade en voiture », j'ai vu un spectacle hallucinant. Sur le sol mouillé étaient allongés une dizaine d'hommes qui, toute la nuit, avaient subi le supplice de la baignoire et de l'électricité, et que des tortionnaires brûlaient au fer rouge. J'ai poussé un hurlement. Cela se passait dans une ferme à Bakallem. Parce qu'entre-temps on m'a transférée de la caserne vers une ferme poétiquement baptisée Ferme des orangers. J'y ai passé deux ou trois nuits et puis de nouveau transférée, vers El Biar cette fois. Là ou était Ben M'hidi. Curieusement, ils ne m'ont pas interrogée sur Abane. Ils m'ont plutôt cuisinée sur Ben Khedda. « Où l'as-tu vu pour la dernière fois ? », me harcelaient-ils. « Tu ne connais pas un certain Ben M'hidi, collecteur de fonds ? ». J'étais à cent lieues de penser qu'il s'agissait de Si Larbi. Il y avait Massu et Bigeard. « C'est pas du travail ce qu'ils t'ont fait là. Ils t'ont laissé des traces. Nous, nous avons d'autres moyens. Les Russes l'ont fait, les Américains aussi, pourquoi ne le ferait-on pas ? » Il fallait comprendre qu'ils allaient m'injecter du sérum de vérité. Me piquer au Penthotal pendant deux ou trois jours, puis ils m'ont emmenée à la Villa Susini. Pour l'anecdote, lorsque j'étais petite, en passant devant cette magnifique bâtisse qui domine Alger, s'il en est, je rêvais et me voyais dans cette maison comme une princesse dans un palais. Triste princesse, effroyable palais !

Lorsque on m'a enlevé le bandeau qui masquait mes yeux à mon arrivée je découvrais Feldmayer, le tortionnaire de service. Une espèce de singe géant avec des mains énormes. On m'a allongée dans une pièce, je ne savais pas où je me trouvais. Puis est entré le capitaine Folques, le maître de cérémonie, le grand patron. Il a défait mon bandeau et m'a dit : « Oh tu as un grand nez », voulant peut-être me complexer. Le pauvre, il ne savait pas combien j'étais fière de mon nez chérifien. A un moment donné, ils m'ont encore bandé les yeux et j'entendais : « Où est Audin ! Où est Maurice Audin ? » il sagissait du jeune militaire, le frère de Maurice. Il y avait également Basta Ali, que je n'ai pas vu mais que j'entendais répéter « Basta ! je m'appelle Ali Basta ! » ainsi pendant deux ou trois jours.

On m'avait entravée avec des menottes, mais malgré cela, il y avait un soldat armé qui me surveillait. Je dépérissais et étais considérablement amaigrie.

Ils ne voulaient pas me présenter au tribunal dans l'état de cadavre où je me trouvais. Ils

m' ont fait des piqûres pour me retaper un tant soit peu. C'était un soldat d'origine allemande qui me les faisait. Il me répétait quand nous nous retrouvions seuls : « Attention fidèle à l'Algérie, il faut rester fidèle à l'Algérie ».

Puis ce fut le tribunal...

D'abord Serkadji, pour la deuxième fois. Le procès dit des « libéraux ». J'ai été condamnée à cinq ans.

Puis ils m'ont emmenée à El Harrach ou il y avait Moufdi Zakaria, qui a réussit à nous faire passer ces poème et nous avons été les premières à les chanter.

Un matin, ils nous ont annoncé notre transfert à Birkhadem, mais à notre surprise, direction l'aéroport. Ils nous emmenées en France à Paris, à la Roquette. Nous y sommes restées deux ou trois mois gardées par les bonnes soeurs.

Puis on m'a emmenée à Rennes. Puis à Pau, dans le sud-ouest de la France. A Pau, Nelly Forget connaissait Germaine Tillon, celle-ci démarchait pour libérer quelques détenues qui n'étaient pas condamnées à de lourdes peines. C'est comme ça qu'elle a obtenu la libération de certaines filles, parmi lesquelles je figurais. J'ai vu mon juge, je lui ai dit : « Je n'ai même pas une carte d'identité, donnez-moi une autorisation pour que je me rende à Paris pour en établir une ». En fait je voulais me faire la malle et retourner au pays. C'est ainsi que je me suis rendue à Paris et que j'ai établi le contact avec Abderahmane Farès puis avec le FLN. Je suis allée en Tunisie. Je voulais absolument rentrer en Algérie. Après quelque temps, j'ai vu M'hammed Yazid et lui ai demandé de rentrer au pays. Ce qui a été fait. J'ai rejoint l'Exécutif provisoire à Boumerdès"