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Essai Farid Kacha - "L'assassinat d'un Président"

Date de création: 07-07-2020 19:32
Dernière mise à jour: 07-07-2020 19:32
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VIE POLITIQUE - BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ESSAI FARID KACHA- « L’ASSASSINAT D’UN PRESIDENT »

L’assassinat d’un président. Psychiatrie et Justice. Essai du Pr Farid Kacha, Thala Editions, Algerr 2016,235 pages,  1 200 dinars

Annaba, Maison de la Culture, 29 juin 1992, 11 h 30, le Président Mohamed Boudiaf est assassiné par un membre de la (nouvelle et supplémentaire )  garde rapprochée (un élément du Gis .... désigné à la  dernière minute...porteur d’un ordre de mission individuel différent de l’ordre de mission collectif établi pour le groupe.....et désignation imposée par un Commandant contre le gré du Lieutenant en charge du groupe , un élément « indiscipliné » et « connu , par son entourage, pour ses sympathies envers la mouvance islamique » selon la « Synthèse d’enquête de la Commission nationale d’enquête») .....le sous-lieutenat Lembarek Boumaarafi.

L’auteur est d’abord appelé ,le 18 juillet, à assurer « une surveillance médicale du détenu emprisonné à Serkadji ».Puis, le 17 août, la mission d’expertise psychiatrique lui est proposée. Ce qu’il assure en compagnie du Pr Driss Moussaoui , chef de service de psychiatrie à Casablanca. Le 31 août l’expertise commune est signée....malgré des avis divergents . Conclusion : « Le prévenu avait conservé intacte son discernement au moment de l’acte qui lui est reproché ». Procès :  le 3 juin 1995 ,  c’est la condamnation à mort (commuée en détention à perpétuité par la suite) ...

Janvier 2008, le psychiatre revoit (quatre années après sa demande officielle ) L. Boumaarafi.....pour , seulement, dit-il, « pratiquer un examen psychiatrique de son évolution clinique ». Curiosité toute scientifique qui ne prend que quelques heures.  Toujours aussi rigide, toujours à la recherche d’une société idéale, aucune remise en cause, aucune culpabilité, inébranlable dans ses convictions...Pour l’auteur, « après plusieurs années d’incarcération et d’isolement , les résultats de l’expertise réalisée en août 1992 restent valides » ...et il s’interroge sur la culpabilité de tous les autres (les grandes institutions y compris) , notre culpabilité, car « étroitement liés au crime , à la  mort, par quelque chose d’indicible et de puissant »....et sur le sentiment que « l’expertise  a fait figure de luxe inutile , restée à la porte de la réflexion collective,  parce qu’en réalité d’autres éléments ont pesé trop lourd , et trop fort »....comme ce qu’il appelle ,pudiquement à mon avis, « l’idéalisme religieux » ....... qui avait engendré une haine meurtrière pour les « gouvernants ».

L’Auteur : Il est docteur en médecine et professeur de psychiatrie à la Faculté de médecine d’Alger, ainsi qu’ expert près les tribunaux ....depuis juin  1970. Assistant puis prof’ à la faculté de médecine de Genève (Suisse). Lauréat du prix maghrébin de médecine en 1987.

Fondateur et président de la Société algérienne de psychiatrie, fondateur et rédacteur en chef de la revue « Le lien psy », membre fondateur de l’Association franco-maghrébine de psychiatrie et de l’Association algéroise de thérapie familiale

Extraits : « Aujourd’hui, le fait de recourir à une expertise psychiatrique après un acte délictueux grave, est obligatoire dans tous les pays ainsi que dans le notre. Cette obligation met , chaque fois, la psychologie de l’inculpé au centre du débat, ce qui n’est pas fait pour plaire aux juges » (p15), «Dans ce monde de plus en plus angoissant, la pensée conspirationniste , comme la pensée magique à l’époque de nos parents, s’efforce de réintroduire du sens, de la cohérence , une logique fut-elle délirante, pour expliquer le cours des événements «  (p 23), « La psychiatrie doit donc gérer la liberté de certains individus, dans l’intérêt de la société. Elle doit garantir la sécurité mais, en même temps, éviter de menacer les libertés individuelles » ( p 31), «  Le souci de jouer un rôle important et de passer à la postérité semble presque ne jamais manquer chez les magnicides » (p 79), « Un crime crapuleux , dans un quartier populaire, fait couler un minimum d’encre et laisse le moins de place aux rumeurs et à l’activité fantasmatique....Mais si le crime est odieux , la population est convaincue que c’est l’oeuvre d’un fou. Crime et folie sont alors confondus, il arrive même qu’on qualifie le coup de folie, un passage à l’acte criminel incompréhensible.....Paradoxalement, lorsque  la victime est une personne publique ou une personnalité politique de première importance, l’idée qui s’impose à nous, c’est que l’acte ne peut être qu’une vengeance d’un ennnemi, c’est un acte politique «  (pp 93 et 94)

Avis : Tout, tout, ou presque tout sur la psychiatrie. Et, surtout, vous allez  apprendre beaucoup plus sur votre personnalité que sur celle de « l’assassin d’un Président »

Citations :  «  Les événements qui marquent l’Histoire d’un pays sont toujours d’actualité et le demeurent à l’infini » (p 7), « Rien n’est plus insupportable pour la raison que ce qui paraît inexplicable »  ( p 20), « Paradoxalement, lors des guerres et des périodes de troubles sociaux, les sujets présentant ces deux types de personnalité (paranoïaque et anti-sociale) sont tirés vers la gloire et le pouvoir, mais lorsque la paix sociale est de retour, ils sont livrés aux juges et aux psychiatres » (p 37)