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Ouvrage Monika Borgmann- "Said Mekbel...."

Date de création: 29-06-2020 18:10
Dernière mise à jour: 29-06-2020 18:10
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COMMUNICATION – BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- OUVRAGE MONIKA BORGMANN- « SAID MEKBEL……. »

Said Mekbel : une mort à la lettre. Entretiens. Ouvrage de trois grandes interviews de Monika Borgmann (Préfaces de Belkacem Boukherouf et de Youcef Zirem). Editions Frantz Fanon , Tizi Ouzou 2015 (Dar al-Jadeed, Beyrouth, 2010 et Téraèdre, Paris 2008) , 111 pages, 500 dinars

Trois grands entretiens à Alger, en pleine tourmente, les 4, 12 et 16 décembre 1993. Soixante dix questions au total :En vrac, sur la mort de Tahar Djaout,sur la peur d’être assassiné ou enlevé ou torturé, sur l’idée de l’exil, sur l’écriture (encouragé au départ par Henri Alleg et Kateb Yacine , en 62 , puis par la suite par T. Djaout pour aller encore plus loin dans l’art d’écrire),sur la série d’assassinats d’intellectuels et de journalistes, sur les lettres de menaces, sur la vie quotidienne et les dangers encourus, sur la presse, les journalistes et la profession, sur le Fis, sur l’armée, sur les généraux,  sur Toufik et la « sécurité militaire »,sur les victimes des terroristes , sur les mafias, sur le Ffs, sur le pouvoir, sur la torture…

Toute une vie en trois entretiens. Une vie d’engagements (toujours dans le journalisme critique)  et de résistance, de talent, de réflexions mais aussi d’inquiétudes (pour les autres, pour  soi, pour la famille, pour les amis et confrères, pour le pays…).

Tout ça dans la lucidité la plus totale souvent, la plus incompréhensible parfois (surtout pour la journaliste qui l’interviewait et cela se perçoit aisémment dans les questions,  mais aussi pour les lecteurs d’aujourd’hui). Avec ,bien sûr, quelques jugements un peu trop tranchants et que l’on comprend parfaitement si l’on se rappelle le contexte infernal de l’époque au sein duquel notre homme vivait totalement immergé sans se cacher. Mekbel vivait entièrement dans sa société et pour ses lecteurs  ….jusqu’à son oubli des dangers  (ou leur prise en compte). N’est pas intellectuel (et journaliste) qui veut !

Trois grands entretiens. Soixante dix questions. Soixante dix réponses, courtes ou longues qui, mieux qu’un essai politique, décrivent avec justesse les débuts d’une décennie noire qui allait devenir très rapidement rouge.Une situation difficle à imaginer aujourd’hui par ceux qui ne l’ont pas connue et situation qui n’a pas encore livré tous ses secrets. Secrets que beaucoup (décideurs encore en vie ou terroristes repentis ou cachés) veulent enterrer (sic !) à tout jamais.

Les Auteurs : Said Mekbel est né le 30 mars 1940 à Bejaia…..et il est mort , assassiné le 3 décembre 1994 par les terroristes (ou par une mafia politique, on ne sait au juste  ?) , alors qu’il terminait de déjeuner juste à côté du journal dont il était le directeur, le quotidien Le Matin.Physicien de formation(Ingénieur docteur), c’est  un des journalistes algériens les plus connus et les plus talentueux et ce ,déjà depuis 62, avec , entre autres, ses fameux billets corrosifs signés El Gatt (le plus fameux est titré « Ce voleur qui… » publié le jour même de sa mort et qui fait le portrait du journaliste algérien dans la tourmente) ….toujours dans des journaux de gauche (Alger Républicain surtout , chaque fois qu’il n’était pas interdit par les pouvoirs en place)

. Née en Allemagne en 1966, Monika Borgmann , après des études en philologie arbe et en sciences politiques, a   vécu au Moyen-Orient plusieurs décennies et  a obtenu la nationalité libanaise.

D’abord journaliste, avec son mari Lokman Slim,elle a réalisé Massaker, le témoignage de six anciens miliciens impliqués dans les massacres de Sabra et Chatila, film qui a gagné de nombreux prix internationaux. Le couple a aussi coproduit de nombreux documentaires et offre également des services en post-production pour aider les jeunes cinéastes arabes. 

Avis : Pour ne jamais oublier , pour les anciens…. qui veulent lire . Et, pour mieux comprendre , pour les jeunes…. qui savent lire.Des denrées rares !

 Citations : « Le grand problème est de se dire que le terroriste veut terroriser. Si tu lui montres que tu ne cèdes pas à la terreur, c’est déjà une victoire. C’est une victoire sur lui et c’est une victoire sur toi. Parce que sur toi,ça te permet de réfléchir encore plus»  ( Said Mekbel, p 47), « La Méditerranée, c’est toute ma civilisation. Tout en restant vers l’Afrique. Mais je ne me sens pas du tout arabe » (Said Mekbel, p 57), « Le grand malheur de l’Algérie, c’est la corruption.Il n’y a pas que la corruption financière, il y a aussi la corruption morale. Certains intellectuels sont corrompus. Et , je crois que c’est cette corruption , qui atteint la famille, qui s’est répandue partout . C’est le grand mal» (Said Mekbel, p 69), «  La mafia. On va revenir vers le petit village natal de la mafia.Les clans. Et c’est comme ça que va être géré le pays.On ne va pas résoudre les problèmes de ruptures, changer de régime, etc…Non, on va s’arranger pour manger le gâteau en commun et pour que chacun ait sont petit morceau. C’est comme cela que ça va se passer » (Said Mekbel, p 87), « Les troupes du Fis, ce sont les troupes de l’école fondamentale. La justice maintenant, ce qu’elle est devenue, ce sont les juges de l’école fondamentale.Les militaires, bientôt ,vont être les militaires de l’école fondamentale. Alors, dès que les militaires seront ainsi, il n’y aura plus rien  » (p 89).