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Amenzou N Tafsut

Date de création: 04-03-2020 18:41
Dernière mise à jour: 04-03-2020 18:41
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SOCIETE- PRATIQUES- AMENZOU N TAFSUT

 

 © El Watan/ Djamel Alilat, dimanche 1 mars 2020

Dans la tradition, la population locale a fêté l’arrivée du printemps avec un rituel de bienvenue où le repas et les mets consommés symbolisent l’abondance et la richesse.

Les villages des Ath Abbes ont connu une journée particulière riche en effervescence et en communion avec la nature ce vendredi 28 février.

En effet, c’est la tradition de l’Amenzou n Tafsut, le jour qui marque l’arrivée du printemps dans l’ancien calendrier agraire en usage depuis les temps anciens. Amenzou n Tafsut est une fête rituelle qui marque la fin de l’hiver, saison des disettes, et l’arrivée du printemps, la saison du renouveau.

La tradition de partir à la rencontre de «Tafsut» est encore très vivace dans la région des Ath Abbes ou elle se maintient dans toute cette vaste contrée de montagnes qui se répartissent aujourd’hui sur les trois communes de Boudjellil, Ighil Ali et Ait Rzine.

Au contraire d’autres communes et régions limitrophes où cette coutume n’existe pas du tout. Plus on va vers l’est, en direction des villages de Bordj Bou Arreridj et Sétif, plus cette tradition est vivace même si elle s’exprime différemment.

Ce qui pourrait constituer, d’ailleurs, un véritable travail de recherche pour les chercheurs en anthropologie et sociologie.

Dans tous les foyers, on commence les préparatifs de la célébration de l’arrivée du printemps la veille par réunir les ingrédients nécessaires au repas traditionnel. Les femmes préparent la pâte des beignets (lesfendj) du petit-déjeuner afin qu’elle lève et soit prête au petit matin.

Dans les champs et les jardins potagers, on va chercher les herbes et les légumes qui vont garnir le repas qui va servir de déjeuner et de dîner et tous les enfants reçoivent des corbeilles de bonbons qu’ils balancent fièrement au bout de leurs petites menottes sur le chemin vers mère nature.

Le repas traditionnel de l’Amenzou n Tafsut a pour but d’accompagner le rituel de bienvenue à la saison de l’abondance et de la fertilité. C’est un couscous de légumes et de plantes aux vertus dépuratives cuits à la vapeur et mélangés après cuisson aux grains de couscous.

Communément appelé AmeqfoulTameqfoult ou bien Tchiw-tchiw, ce couscous est assaisonné de poudre de piments rouges et de morceaux d’achedlouh, la viande séchée et salée et consommée avec des œufs durs et souvent accompagnée de petit-lait aromatisé au romarin.

Chant traditionnel

Certaines familles tiennent encore à la tradition en allant cueillir dans la nature les plantes nécessaires à la confection. Voici quelques-unes de ces plantes avec leur équivalent en kabyle.

Il s’agit de la scolyme (taghediwt), de la salsifis, appelée également barbe de bouc (achamar ouhouli), de la thapsia (adheryis), de l’ail triquètre (vivrasss), de l’ail des ours (tarast), de la mauve (mejjir), du coquelicot (ouahrir), de la scorsonère (talma), du laiteron (tifaf), de l’ortie dioïque (tazougdhouft), de la camomille (wajjdhim gu’irssen), de la bourse de Pasteur (tif el merqa), de l’inule des montagnes (timâouqelt) et du pissenlit, appelé également dents de lion (toughmas temghart).

Cette liste, bien entendu n’est pas exhaustive. Avec une telle quantité de plantes comestibles, médicinales et aromatiques, chaque bouchée est un véritable médicament.

Ce plat s’accompagne quelques fois avec du petit-lait et des œufs durs. On fait également cuire des fèves dans de l’eau bouillante avec quelques morceaux de thapsia ou des pois chiches. Le repas et les mets consommés se veulent une façon de souhaiter l’abondance et la richesse.

Cette année la célébration du printemps a été des plus timides au niveau du village d’Ighil Ali car décision a été prise de respecter le deuil de certaines familles frappées par le malheur. Les femmes se sont contentées de leur traditionnelle sortie vers le site de Lekhiar.

Par contre au niveau du village voisin de Taqorabt, c’est l’association locale Tighra qui a pris sur elle de chapeauter quelque peu cette fête traditionnelle en organisant une randonnée avec les femmes, les enfants et tous les villageois désireux de fêter le printemps vers le très beau et très bucolique site de Tigarth, au pied de la montagne d’Azrou n Gaga.

Dans la clairière fleurie de Tigarth, les femmes ont donné la pleine mesure de leurs talents dans le chant traditionnel en s’accompagnant du bendir.

Des moments de joie et de convivialité qui permettent de ressouder les liens sociaux, de chasser le stress cumulé dans les foyers et d’oublier que cette année, même si on part à la rencontre du printemps, l’hiver n’a pas été au rendez-vous.

C’est aussi une façon de rester optimiste et de croire en des lendemains d’abondance et de prospérité.