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Roman Malek Haddad - "La dernière impression"

Date de création: 11-02-2019 19:13
Dernière mise à jour: 11-02-2019 19:13
Lu: 1049 fois


SOCIETE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN MALEK HADDAD- « LA DERNIRE IMPRESSION »

La dernière impression.  Roman de Malek Haddad (préface de Nedjma Benachour) . Editions Média Plus, Constantine 2015 (Editions René Julliard, Paris 1958, Editions Bouchène, Alger 1989), 800 dinars, 184 pages.

Novembre 54. La guerre est là, bel et bien là, dans une ville vivant encore –en surface- dans une certaine indifférence.

Constantine, la ville qui, du haut de ses ponts bâtis entre les rochers , contemple un  (autre) légende naissante

D’un côté, Said, l’ingénieur bardé de diplômes qui vient de terminer la construction d’un pont permettant aux populations rurales déshéritées d’économiser du temps sur 60 km de chemins difficiles. Son frère, Bouzid est déjà engagé dans la lutte armée .....et, il est décidé que les ponts construits (dont ceux par Said) doivent « sauter ».

Il y a , aussi, Lucia, l’enseignante provençale arrivée depuis peu , amoureuse de Said...Mais, avant de rejoindre son nouveau poste en France, elle est victime d’une balle perdue lors d’un « accrochage » en ville. Elle voulait tellement que Said parte avec elle .....

Il y a , enfin, Chérif, le beau-frère , petit fonctionnaire bien « assimilé » qui veut « rentrer » en France malgré le refus de son épouse.

Chronique d’une guerre qui n’est pas encore généralisée mais qui pose déjà, avec accuité, le problème des choix. Accepter que « ses » ponts sautent ? Accepter sans regret la mort (inattendue) de Lucia, la gentille « métropolitaine » si amoureuse, ne supportant pas l’ « apartheid » colonialiste et si attentionnée ? Ne pas trop s’attacher aux images (extérieures) calmes et sécurisantes des villes et des populations de France ? Oublier ses diplômes ? Etre ou ne pas être.....Faire ou ne pas faire.....Telles sont les questions.....Servir enfin à quelque chose.....Etre avec les siens.....telles sont les réponses.......Dans la douleur ? non. Dans la réflexion et dans l’examen de la réalité vécue.

 

L’Auteur : Constantinois (né le 5 juillet  1927) . Un père instituteur. contemporain (et ami) de Kateb Yacine et de M’hamed Issiakhem, (ils formeront un «  trio infernal » selon Mohamed Harbi)  un des pionniers de la littérature nationale francophone, auteur de quatre romans, d’un essai et de deux recueils poétiques. Une œuvre traduite en près d’une quinzaine de langues. Durant la guerre, il effectuera plusieurs missions (à l’étranger) de conférencier et de diplomate au nom de l’Algérie combattante. Après l’Indépendance, il mènera une carrière de journalisme culturel tout particulièrement dans le quotidien An Nasr (de Constantine) de 1965 à 1968.  Directeur de la Culture au ministère de l’Information et de la Culture avec le ministre M-Seddik Benyahia (1968-1972) , puis Ces au sein du même ministère (chargé de la production culturelle en français).  Co-fondateur et animateur de l’Union des écrivains algériens (Sg de 1974 à 1976) . Un seul regret pour tous ses admirateurs : il avait décidé de ne plus écrire en français...qu’il considérait désormais comme sa douleur et son exil. Décédé à Alger le 2 juin 1978.

Extraits: « Une guerre , même juste, est une difficile habitude à prendre. Une habitude à prendre jusqu’à ce que le décor s’adapte de lui-même au nouveau jeu des acteurs » (p 15), « Je suis comme les autres, je suis avec les autres. Je comprends leur galette et leur fusil......Tout me rattache à eux, tout m’identifie à eux. Je ne suis moi-même qu’avec eux  » (p 119), «  Faire, c’est un verbe qu’il faudrait embrasser sur les deux joues.....Faire......bien faire, faire du bien, faire beau, nom de Dieu, faire beau ! Servir. Servir non pas comme un garçon de café vous sert un Pernod, mais servir, servir à quelque chose » (p 137), « L’Algérien commença à compter le premier jour du onzième mois de l’année mil neuf cent cinquante quatre. Avant, c’était de l’algèbre. On n’écrit plus avec des lettres » (p 142)

Avis : Peut-être le mieux écrit de tous les romans de Malek Haddad. Car le premier, celui du grand amour...pour l’écriture, la prose et la poésie.Celui en lequel tout est investi. Celui qui affronte et tente de répondre aux mille et une interrogations de l’ « être » et le « faire » dans une société colonisée, opprimée. Donc,  un livre superbement construit, mélangeant les genres, avec une écriture recherchée  certes mais aux phrases bien faites et aux mots qui touchent. Des longueurs.....mais quel style !

Citations : « Souvent les amoureux font (....) des campagnes électorales (.......). L’amour n’a pas de programme. Ballotage interdit » (p 25), « Le bonheur ne fait jamais crédit. On dirait parfois qu’il prend un malin plaisir à nous laisser nous endetter. Vous payerez à la caisse. Rien n’est plus traître que le self-servive. Tous les fauchés de joie le savent bien « ( p 47), « Les amoureux sont des avares. Une seconde est une seconde, ça ne fait pas deux secondes, ça fait deux baisers » (p 78), « Rien n’est métaphysique dans le malheur humain » (p 79),