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Roman Nassira Belloula- "Aimer Maria"

Date de création: 20-01-2019 10:08
Dernière mise à jour: 20-01-2019 10:08
Lu: 1178 fois


SOCIETE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN NASSIRA BELLOULA- « AIMER MARKIA »

Aimer Maria. Roman de Nassira Belloula. Chihab Editions, Alger 2018, 750 dinars, 154 pages

 

Maria est mariée à seize ans....elle qui , fille unique, ayant vécu  aimé par des parents très amoureux l’un de l’autre. Trente ans de vie commune......avec un véritable « fils à maman » , un macho comme on n’en fait (presque) plus. Quatre filles, deux garçons....et un bébé mort-né. Trente ans de silence, transformée en véritable machine à enfanter sans qu’elle éprouve le moindre plaisir. Au contraire même...l’acte d’amour conduit par l’époux étant sacralisé. Religion oblige !

Trente ans de silence. Obéissant aveuglément à tout ce qu’on (le mari, la belle-mère, les imams cathodiques....) lui prescrivait (plutôt intimer) : ne pas sortir seule de la maison, ne pas regarder par la fenêtre, sortir voilée, ne pas parler aux autres.....subir, sans protester....ni parler,  tout ce que l’homme-époux veut à tout moment et comme il l’entend.....

Et, puis, un jour, le déclic ! Le sermon d’un imam cathodique....affirmant que « l’épouse pieuse, dévouée et croyante sera récompensée par Dieu.... qu‘elle entrera au paradis et.....y retrouvera son mari.....pour l’éternité......et elle le ....partagera avec des femmes et des houris, chacune à son tour, sans jalousie, ni fâcherie..... ». Des mots qui font « tilt » dans le cerveau de la dame « qui tient pour acquis les connaissances de ces prédicateurs ».

Trente ans de peines et de « solitude », femme avant l’heure, mère avant l’heure, grand-mère avant l’heure.....basta ! Faudrait-il donc retrouver « là-haut » pour une éternité qui ne finira jamais, le bourreau d’ « ici-bas »....qui, en plus  se trouvera « récompensé ». Encore « baisée » au paradis par le mari ? Jamais !

Elle décide alors de quitter le domicile conjugal pour aller se réfugier auprès de sa mère, toujours aimante, au sein du domicile familial encore empli de souvenirs heureux.......dont celui d’un lointain amour de jeunesse. Des souvenirs qui la feront sombrer dans la  douce folie dans un passé heureux mais raté....les choix de vie n’ayant pas été faits de manière catégorique au moment où il le fallait ; la société, la famille, les us et coutumes, les habitudes, les vues  religieuses ....dominant et déterminant les comportements, même les plus regrettables et les plus dommageables.

Deux récits se croisent :

Celui des filles –désormais assez grandes- qui s’échinent à décrypter les non-dits des relations entre leurs parents (pas facile quand on sait que , souvent, le père est très sévère avec la mère et très « cool » avec ses enfants ».....et que , pudeur oblige, les confidences des mamans s’arrêtent toujours à la porte de la chambre à coucher). Mais, ils comprendront.

Celui de la mère, rétrospectif, qui éclaire la révolte subite décrétée contre sa soumission. Une révolte pour se « recoller », se « récupérer »., car « brisée en morceaux ». 

L’Auteure : Journaliste, ayant travaillé dans plusieurs quotidiens d’information algériens, actuellement installée au Canada. A son actif, plusieurs ouvrages : romans, poésie, essais

Extraits : « Elle ne s’appartient plus, elle appartient à nos corps et au corps du père ; elle est mère et épouse. Deux rôles qui l’excluent de toute autre alternative. Elle ne peut plus être femme » ( 41), « Depuis la nuit des temps, le système patriarcal a trouvé écho dans le religion et a fait de Dieu un allié dans cette aliénation acharnée contre tout ce qui est féminin. Ainsi se perpétue ce système qui tire sa puissance de sa verge et non pas de son cerveau, opprimant et réduisant à néant chaque voix de femmes qui voudrait sortir du chaos » (p 109)

 Avis : Féministe ? non . Seulement défenseuse de la cause des femmes, d’abord jeunes filles mariées contre leur gré,  épouses et mères ....qui  ne supportent plus la « suprématie » de l’homme....une suprématie « fabriquée » par  société  traditionnelle algérienne et musulmane et des époux machos. A lire d’abord et avant tout par les (futurs et actuels) maris !Et, par les parents (surtout les pères) des jeunes filles « à marier ».Attention, style douloureux.

Citations : « Quel rôle peut avoir une mère sinon celui d’une mère ?Aucune fille n’osera parler de la libido de sa mère, aucun fils n’osera imaginer que le corps d’une mère puisse être ni qu’il puisse succomber au charme, au romantisme, au plaisir, aux caresses autres que celles maternelles » (p 41), « Dans notre monde, le sexe ne s’envisage que dans la tête et ne se livre pas » (p 43), « Dans une belle famille, on passe de la fille dorlotée à la fille déchue, de la fille capricieuse à la fille dépossédée, de la fille servie à la fille servante » (p 52), « Attendre, c’est cesser d’être, c’est s’abandonner sur le bord de la route » (p 87), « Le pire dans cette déconstruction (de la femme épouse et mère ) , c‘est le cas  pathologique du père qui ne l’appelle que par des interjections ; hé ,ho, ha, parfois criant tu es où ? Où y a m’ra hé femme ! - .La honte de dire sa femme, éloigner l’innommable , lui substituer des palliatifs pour ne pas la nommer. La nommer, c’est lui permettre d’exister » (p 111) .