VIE POLITIQUE- BIBLIOTHÈQUE D’ALMANACH- ESSAI RACHID BOUDJEDRA- « LES
CONTREBANDIERS DE L’HISTOIRE » (Nouvelle édition 2025)
Les contrebandiers de l’Histoire. Pamphlet de Rachid Boudjedra. Dar El Hikma Editions., Alger 2025,
126 pages, 1 200 dinars.
Avec notre Rachid Boudjedra national
(et nationaliste) devenu, avec un « âge n’aidant pas », de plus en
plus sourcilleux , il faut s’attendre à tout
........ce qui peut « révolutionner » le paysage culturel algérien, à
tout moment et en tous lieux, durant ses brusques « montées » en
attaque ou après les « pièges et harcèlements » médiatiques.
Cette fois-ci, c’est un de ses anciens ouvrages qui est présenté
, « enrichi ».
Donc, l’ouvrage est plus d’un
simple pamphlet . C’est un écrit –brulôt (et
il le reconnaît amplement ), décidé,
« pour ne pas mourir de ma lâcheté » dit-il .... après la publication , en 2007, du livre
de Wassila Tamzali, « Une éducation
algérienne », où « elle disculpait son
père abattu à Bejaia,pendant la
guerre de libération......» ...et, après la réception en Algérie
de Feriel Furon, arrière petite-fille du
dernier des Bengana, décédé en 1947 et qui a,
« toute sa vie, et avec toute sa tribu de féodaux sanguinaires , torturé,
humilié, dilapidé et assassiné le peuple algérien ». Venue
(invitée ?) en Algérie, elle et son livre « ont été encensés par
certains parlementaires algériens, par la presse....par
la télévision de l’Etat algérien, par des libraires serviles ... »
Dans sa large « radiographie clinique », il y a beaucoup d’ (im-) patients : B.Sansal, K.Daoud, S.Bachi, A.Djebar,
(seulement égratignée !) W.Tamzali, A.Boumehdi (Ali) , M. Zemmouri,
Y. Khadra, L. Salem, certain(e)s professeur(e)s de français de
l’Université d’Alger, et bien d’autres dans la littérature, la
peinture, le théâtre ou le cinéma dont les réalisateurs de « productions
cinématographiques produits sur commande », des « films-propagande à
la guimauve » , et les « dizaines de peudos « artistes » algériens (qui) ont
rejoint les Sas de l’armée française......Selon lui, « certains de ces
jeunes « jaunes » sont devenus des artistes importants et reconnus
par l’Algérie indépendante » ....... Dans le même sac , on retrouve A. Camus, F. Furon, A. Arcady,M. Onfray........sans oublier B.H.Lévy, Finkielkraut, E.Zemmour,
Bruckner, Glucksmann, R. Menard, J.P Chevènement
(et tant d’autres), les « camarades socialistes français », à leur
tête G. Mollet et F. Mitterand, L.
Visconti, Melina Mercouri,
Delacroix......Beaucoup de monde. Trop de monde ?
Heureusement, il y a F. Yveton , A. Tebboune, S. Bencheikh (de l’Onda) , H’mida Ayachi, A. Fenni, R. Cherif,
Omar Ourtilane , L. Hamina et bien des « chrétiens , juifs, athées
mais algériens jusqu’au bout des ongles », dont bien d’entre-eux « vivent
en Algérie et sont fiers d’être Algériens » et ..... J-P.
Sartre, , J . Genêt,Mandouze, Amos Gitaï,
Shlomo Sand, Jeanson, Yves Lacoste,L . Mauvignier, J. Ferrari, J. Andreas, , Picasso,
J . Genêt, P. Guyotat ......Ahh, j'allais oublier ....... S. Bouteflika qui
l’a soutenu publiquement lors de sa mésaventure médiatique avec El Khabar.
A noter aussi que Rachid Boudjedra insiste sur le
fait qu’il ne s’agit pas dans son livre de condamner ou de punir mais seulement
et avant tout de DIRE : « De fouiller notre inconscient pour le dévoiler,
pour nous dévoiler, et nous connaître » . C’est
pour cela ,à chaque fois qu’un nom est avancé, il
précise qu’ il sépare de façon claire les œuvres (dont certaines, de
qualité indéniable, sont sont à lire ou à voir
et à étudier) ainsi d’ailleurs que des moments de vie (exemple des positions
contre les guerres colonialistes en Algérie ou au Vietnam ..) des
personnes , devenues , avec le temps et les intérêts, souvent bien mesquins ou
intéressés, de véritables « contrebandiers de l’Histoire »
L’Auteur : Né
en septembre 1941 à Ain Beida (Aurès). Etudes en mathématiques et en
philosophie.1959, il rejoint le Fln. 1962 : Licences....Enseignant au
lycée de Blida et à l’ Université, militant
politique (Pca puis Pags) romancier,
journaliste-chroniqueur, poète, dramaturge,scénariste
d’une douzaine de films dont « Chroniques des années de
braise », « personnage contrasté et extrêmement sensible,
suscitant la polémique » (A. Cheurfi)
.....une œuvre considérable (en français et en arabe) , traduite dans le
monde entier. Premier ouvrage publié en 1969 : « La
Répudiation » (écrit en réalité en 1965).....durant
« l’ère du soupçon à l’égard du langage poétique, du récit
complexe ......Il régnait une sorte d’islamisme
frotté, paradoxalement , de jansénisme..... J’étais mis au ban des
traîtres qui ont « répudié ! » leur pays »...
Extraits : « Non
seulement « le Parti de la France » existe bel et bien mais il a
toujours existé, ce qui est banal et presque naturel dans l’Histoire des
peuples anciennement colonisés, dans la mesure où, comme l’a écrit si
génialement Frantz Fanon dans « Les Damnés de la Terre » en 1959,
déjà, « le complexe du colonisé est irréparable et il découle du
complexe de l’esclave qui refuse d’être libéré par son maître » p 16),
« La colonisation qui a commencé avec les Ottomans et s’est terminée avec
les Français a été féroce et déshumanisante.Son
horreur , sa cruauté et sa longévité ont été démesurées, démentes et
incroyables « (p19), « Il se trouve que la très longue colonisation
ottomane de
l’Algérie qui dura deux siècles a été elle aussi d’une
très grande cruauté mais comme ces janissaires étaient des musulmans, leurs
crimes leur ont été pardonnés » (p52), « Le monde occidental a besoin
de larbins et de supplétifs issus des anciennes colonies, quelque peu
exotiques, faisant couleur locale mais pas trop. Grâce à ses sbires, il se
trouve des témoins autochtones pour faire la démonstration de sa probité et de
sa bonne foi qui n’est que de la condescdance
sournoise , trafiquée et artificielle » (p 68) , « De la guerre
d’Algérie et d’Indochine aux guerres du Golfe et du Moyen Orient, les
consciences politiques n’ont pas évolué dans un monde qui se prépare lentement
à commencer la troisième guerre mondiale » (p 81), « Dénigrer
l’Algérie est devenu une mode pour certains intellectuels algériens installés
en Europe et pour la droire française raciste et idiote.Et dénigrer , ce n’est pas critiquer » (p87),
« Pendant la guerre d’Algérie, des dizaines de pseudos
« artistes » algériens ont rejoint les SAS (Service d’Action Sociale)
de l’armée française pour faire le sale boulot :détourner le peuple
algérien de son combat primordial.Certains parmi ces
jeunes « jaunes » sont devenus des artistes importants et reconnus
par l’Algérie indépendante » (p 115)
Avis : C’est un pamphlet comme annoncé
en couverture . Pamphlet : « Petit écrit satirique agressif dirigé
contre quelqu’un , une institution....Libelle » (Le
grand Larousse illustré 2016, p 830). Donc , point
d’étonnement connaissant le « militantisme » et l’ « épidermisme »( sic !) de celui qui reste, malgré tout, le plus
grand de nos écrivains contemporains .
Sacré Boudjedra Toujours droit dans ses bottes.Direct dans ses propos,
tranchant dans ses jugements, et surtout franc dans ses objectifs.Un
pamphlet comme on n’en voit si peu.Heureusement (Trop
de risques ?).Hélas (pour les vérités assénés ?). Ouvrage déjà lu et présenté mais celui -ci a été revu et
« augmenté ». A re-lire.
Citations : « L’inconscient
du colonisé est un gouffre sans fond ! » (p
17), « La démocratie est le contraire du mensonge et des petits
arrangements » (p28), « L’Algérie pour moi n’est pas un Etat
totalitaire mais un système autoritaire et vieillissant où la corruption est un
vrai désastre économique « (p 86), « C’est l’enracinement dans la
douleur, la nôtre et celle du peuple que nous ne connaissons pas vraiment et
que nous côtoyons superficiellement (...).Sans cet enracinement, il n’y
pas d’universalité. Nous écrivons local.Nous
peignons local.Nous réalisons local.C’est
pourquoi nous sommes victimes aussi de l’Occident qui continue à nous
subjuguer » (p94), « Notre production artistique manque de finesse,
de métaphysique, de passion et de ....folie » (p96),