COMMUNICATION- PERSONNALITÉS- SERGE MICHEL
(JOURNALISTE)
Né le 22 juillet 1922 à Saint-Denis (France),
mort le 27 juin 1997 à Chevilly-Larue (France), enterré à Alger
(Algérie) ; journaliste, écrivain, poète, caricaturiste, scénariste ;
militant anticolonial, membre du FLN au service de l’information, attaché de
presse de Patrice Lumumba (République démocratique du Congo), formateur de
journalistes et fondateur de journaux en Algérie, au Congo Brazzaville et en
Guinée-Bissau.
Rebelle, anarchiste, libertaire, Serge Michel a
consacré sa vie aux combats indépendantistes, jusqu’à prendre la nationalité
algérienne en 1962. Journaliste-militant ou militant-journaliste, il prêta sa
plume, sa voix et son expérience aux nations en quête d’indépendance ou
nouvellement indépendantes : l’Algérie principalement, le Congo et la
Guinée-Bissau.
Serge Michel, de son vrai nom Lucien Douchet, nait le
22 juillet 1922 à Saint-Denis, dans une famille ouvrière
. Au début des années 1950, il quitte l’Europe pour l’Algérie,
décidé à en finir avec « ce vieux monde pourri […] de l’humiliation
érigée en système ». Il devient alors Serge Michel, en hommage à deux
figures révolutionnaires, Victor Serge,
militant russe et Louise Michel. Il
découvre d’abord Alger et la société coloniale auprès d’un petit groupe
d’artistes frondeurs qui l’embarque pour de longues soirées arrosées dans les
rues étroites de la Casbah où il a élu domicile. Puis il rejoint la petite
rédaction de La République algérienne, l’organe de presse de
l’Union démocratique du Manifeste algérien (UDMA) fondée par Ferhat Abbas . Il y cumule les fonctions de secrétaire de
rédaction, de reporter et même de caricaturiste, usant ainsi de ses qualités de
dessinateur pour dénoncer dans la presse nationaliste le racisme et
l’arbitraire de la colonisation. Menacé d’arrestation après le déclenchement de
la lutte armée en novembre 1954, il rejoint clandestinement Paris puis la
Suisse à l’automne 1956, avec pour mission d’imprimer le journal du Front
de libération nationale (FLN), Résistance algérienne, et des
dizaines de milliers de tracts.
En juillet 1957, Serge Michel gagne la Tunisie
indépendante où le FLN a installé sa base arrière. Il rejoint le service
presse, notamment chargé de la confection du journal El Moudjahid,
devenu l’organe officiel du Front depuis la disparition de Résistance
algérienne, au sein duquel il est affecté à la mise en page de l’édition en
arabe par le responsable du journal Abane Ramdane .
Avant d’avoir pu avouer qu’il ne maîtrise pas cette langue, Serge Michel
— surnommé Troisième-Collège, en référence aux deux collèges de
l’Assemblée algérienne regroupant dans le premier les pieds-noirs européens et
juifs et dans le second les « autochtones » — travaille avec les
membres de la rédaction arabophone .Au sein du service presse, le militant-journaliste
est aussi chargé de participer à l’animation de l’émission française de la radio La
Voix de la République algérienne qui diffuse des nouvelles du front.
En août 1960, il est désigné par le FLN pour
servir d’attaché de presse à Patrice Lumumba, Premier ministre de la nouvelle
République du Congo, qui a prié les membres du Gouvernement provisoire de la
République algérienne (GPRA), lors de sa visite à Tunis, de lui confier un
conseiller spécialiste de la presse. Suite au coup d’État du colonel Mobutu, il
est contraint de se cacher et parvient à quitter le pays peu de temps avant
l’assassinat de Lumumba en janvier 1961 . De
retour à Tunis, il est impliqué dans la création de l’APS, la première agence
de presse algérienne, fondée avec l’assistance de l’agence tchèque
d’information, le CTK. Serge Michel fait de fréquents voyages à Prague qui
aboutissent à la signature d’un accord permettant le lancement de l’agence à
partir de Tunis. Entre deux voyages, il collabore à El Moudjahid et
rédige les bulletins de l’APS.
Le journaliste-militant se trouve au ministère de
l’Information de Tunis quand la dépêche de la signature des accords d’Évian
tombe le 18 mars 1962. Il débarque à Alger le 4 juillet
. Dès le lendemain, il est chargé de récupérer les locaux du
journal L’Écho d’Alger auparavant occupés par l’état-major de
l’armée française . Cette mission réussie, il s’attèle
au lancement du quotidien national Al Chaâb auprès
de Salah Louanchi, en pointant la nécessité de former
les équipes de la rédaction. C’est ainsi qu’il participe à l’encadrement
du premier stage de journalistes organisé au début de l’année 1964 avec
une trentaine de stagiaires .
Dix ans plus tard, il reproduit l’expérience au Congo
Brazzaville où son ami, le Premier ministre Henri Lopes, rencontré en 1969 lors
du festival panafricain d’Alger, l’a sollicité pour créer une école de
journalisme et un journal. C’est aussi grâce à une autre amitié algéroise qu’il
est accueilli en Guinée-Bissau en 1977, après son départ précipité du Congo.
Serge Michel est invité par Mario de Andrade, devenu ministre des Affaires
culturelles du gouvernement de Luis Cabral, pour l’aider à créer à nouveau… un
journal.
Après dix années à vivre entre Alger et Paris, Serge
Michel s’installe en Algérie à la fin des années 1980, au moment où le
pays instaure le multipartisme à l’issue de la révolte d’Octobre 88. Sa
santé fragilisée, il quitte la capitale pour Ghardaïa, une palmeraie de la
vallée du Mzab située à 600 km au sud d’Alger, où il s’adonne à la
peinture et écrit des scénarios de cinéma. Face à la menace islamiste, il se
décide à quitter l’Algérie au printemps 1994. Exilé à Paris, il fonde avec
d’autres journalistes réfugiés algériens (Sobhi
Belkacem, Bachir Rezoug...) le quotidien Alger
info international. Épuisé , il meurt le
24 juin 1997 à l’hôpital de Chevilly-Larue (Val-de-Marne). Selon ses
dernières volontés, son corps est rapatrié à Alger où il a droit à des obsèques
nationales grandioses, avant sa mise en terre au cimetière d’El Alia.