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Cinéma/ Avis Bachir Derais (2025)

Date de création: 23-07-2025 18:58
Dernière mise à jour: 23-07-2025 18:58
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CULTURE- OPINIONS ET POINTS DE VUE- CINEMA/AVIS BACHIR DERAIS (2025)

©Fb, Bachir Derais, réalisateur, fin juillet 2025

Cinéma algérien : chronique d’une relance contrariée ou otage des conflits internes ?

« Dès son arrivée à la tête de l’État, le président Abdelmadjid Tebboune a affiché son ambition de redynamiser l’industrie cinématographique nationale. En 2020, il crée un Secrétariat d’État à la cinématographie, confié à Youcef Sehairi, un proche du cinéaste Ahmed Rachedi. Ce dernier, acteur historique du cinéma algérien, est à l’origine de cette initiative.

Cette nomination, perçue comme un contournement de la ministre de la Culture Malika Bendouda, engendre des tensions internes. Bendouda, marginalisée, vide progressivement le Secrétariat d’État de toute substance.

Quelques mois plus tard, elle propose sa suppression, entérinée lors du premier remaniement ministériel. Sehairi est limogé.

Une guerre d’influence entre Bendouda et Rachedi

Écarté du dispositif, Ahmed Rachedi revient par la grande porte en février 2021, nommé conseiller spécial à la présidence, chargé du cinéma. Il devient rapidement la figure centrale de la politique cinématographique.

Le conflit entre Rachedi et Bendouda se transforme en guerre d’influence. Bendouda est évincée, remplacée par Wafaa Chaalal. Cette dernière ne reste que brièvement à la tête du ministère : ses propos sur une chaîne égyptienne, affirmant que sa génération était plus à l’aise en français qu’en arabe, précipitent son départ. Soraya Mouloudji lui succède.

Conseiller influent, Rachedi mène plusieurs réformes controversées, dont la suppression du FDATIC (Fonds de développement de l’art, de la technique et de l’industrie cinématographique). Ce fonds, créé en 1968 et réformé en 1990, avait permis l’émergence d’une nouvelle génération de cinéastes et soutenait la production indépendante.

Structures imposées et chaos administratif

Le 24 octobre 2021, deux décrets présidentiels sont signés sur proposition de Rachedi :

Création de El Djazairi, société nationale dédiée à la production d’un film sur l’émir Abdelkader ;

Création du Centre national pour l’industrie cinématographique (CNIC).

Ces deux entités sont directement placées sous l’autorité du Premier ministre, écartant de fait le ministère de la Culture. À ce moment-là, le pays compte déjà huit structures étatiques liées au cinéma, sans véritable coordination ni vision unifiée.

Rachedi concentre alors tous les pouvoirs : nomination des responsables, validation des projets, recrutement. Il tente de reconstituer un modèle inspiré de l’ONCIC des années 1970, qu’il avait dirigée.

Mais deux ans plus tard, cette politique centralisée est jugée inefficace. Rachedi est écarté à son tour.

Le CNIC et El Djazairi sont replacés sous la tutelle du ministère de la Culture par décret présidentiel. Le projet de film sur l’émir Abdelkader reste à l’état de chantier.

Une reprise en main difficile

Soraya Mouloudji hérite alors d’un secteur sinistré : absence de financements, structures désorganisées, climat de défiance. Elle met en place un mécanisme provisoire de soutien, distribuant une centaine de petites aides symboliques aux projets déposés au ministère. En parallèle, elle organise les Assises nationales du cinéma au CIC (Club des Pins), afin de dresser un état des lieux du secteur et poser les bases d’une nouvelle loi.

Deux mois après ces assises, une loi sur le cinéma est votée par les deux chambres du Parlement.

Jugée en contradiction totale avec les recommandations des professionnels, elle suscite une vague de contestation. De nombreux acteurs du secteur saisissent directement le président de la République pour en demander la suspension.

Dans la foulée, Soraya Mouloudji est limogée et nommée ministre de la Solidarité nationale.

Elle est remplacée par Zoheir Balalou, nommé ministre de la Culture en date du 19 novembre 2024.

Une nouvelle tentative de réforme

À peine installé, Zoheir Balalou, sur instruction du président Tebboune, convoque de nouvelles assises du cinéma, semblables à celles de 2022. Les professionnels y expriment à nouveau leurs doléances et dénoncent à l’unanimité la loi adoptée en 2024.

Plusieurs recommandations sont émises, notamment la création d’un Centre national du cinéma (CNC) sur le modèle français, garant d’un cadre institutionnel stable et d’un financement pérenne.

À ce jour, le secteur est en stand-by, dans l’attente de mesures concrètes. La communauté cinématographique reste suspendue à l’issue de cette nouvelle phase de transition. »