VIE POLITIQUE-FORMATION CONTINUE-CAMPAGNE ÉLECTORALE CANADA 2025/ DÉCRÉBIDILISATON
ADVERSAIRES/MÉDIAS SOCIAUX (I/II)
Campagne
électorale : l'art de décrédibiliser ses adversaires grâce aux médias sociaux
et aux mèmes
©https://theconversation.com/Mireille Lalancette, Université du Québec à
Trois-Rivières (UQTR) et Julie Salvador Alonso, Université du Québec à
Trois-Rivières (UQTR), April 30, 2025
CANADA : La campagne est
maintenant terminée. Les Libéraux et leur nouveau chef, Mark Carney, ont remporté cette élection et
formé un gouvernement minoritaire.À la tête d'un
parti au pouvoir depuis 2015, Mark Carney a bien sûr
été l'objet d'attaques durant cette campagne: on l'a associé au gouvernement
Trudeau, accusé de plagiat dans sa thèse de
doctorat à Oxford et on a souligné ses recours aux paradis fiscaux.Discréditer ses
opposants est une stratégie courante pour augmenter sa cote politique, durant
et hors période électorale. Les acteurs impliqués dans la campagne électorale
fédérale 2025 ont su tirer profit des médias sociaux et des mèmes, qui
ont pris de l'ampleur dans le paysage
politique, pour décrédibiliser la concurrence. Retour sur les
stratégies offensives de cette campagne et sur ce qu'elles véhiculent.Respectivement
professeure et étudiante à la maîtrise en communication politique à
l'Université du Québec
à Trois-Rivières, nous nous intéressons à la construction du leadership des
figures politiques dans l'espace sociomédiatique et à la rhétorique numérique. Lors de
cette campagne électorale, nous avons observé les stratégies des partis
politiques et de groupes citoyens visant à décrédibiliser leurs adversaires sur
les médias sociaux.
Pour cette analyse, nous nous basons sur la théorie
du triangle du leadership proposée
par nos collaborateurs italiens Diego Ceccobelli et
Luigi Di Gregorio, spécialistes en marketing politique. Cette théorie met en
scène trois composantes clés permettant d'évaluer le leadership : la
compétence, l'authenticité et la proximité avec l'électorat.
Diaboliser pour mieux régner : des dangers de voter
pour l'autre : La compétence est un élément central du leadership
politique. Les électeurs scrutent les expériences du candidat. Dans une visée
de délégitimation, il s'agit d'attaquer l'intégrité morale de l'adversaire en
le diabolisant. En communication politique, le procédé de diabolisation vise
à renforcer une certaine vision manichéenne et à générer de la polarisation. Il
s'agit de projeter du négatif sur l'opposant afin de valoriser sa propre image.Pierre Poilievre
et son équipe n'ont pas hésité à employer cette stratégie. Sur sa chaine
YouTube, le Parti conservateur a par exemple publié une vidéo accusant
Carney de s'être enrichi sur le dos des travailleurs. Carney y est représenté en noir et blanc, ce qui évoque un
avenir sombre.Un
clip vidéo posté sur
Instagram par Poilievre montre pour sa part des
images chocs d'agressions, accusant Carney et le
gouvernement libéral d'être responsables des taux de criminalité importants.
Ces stratégies axées sur la diabolisation tablent sur les émotions. Elles
instaurent un climat de peur tout en mettant en doute les compétences de Carney à diriger le pays. L'objectif est de mobiliser
l'électorat et de le rallier à la personne qui dénonce : ici Poilievre.
Ridiculiser son rival : du pareil au
«mème» :L'humour cinglant est une composante importante des
actes de décrédibilisation politique. On le retrouve dans des stratégies
rhétoriques oscillant entre ironie et sarcasme. L'objectif
est de discréditer son adversaire en remettant en cause sa compétence, tout en
allant chercher une connivence avec le public.Les mèmes Internet font
partie des nouveaux outils de communication politique utilisés dans une optique de
délégitimation. Ils représentent généralement les politiciens dans
des montages alliant images et messages critiques.Par
exemple, le mème suivant – généré par un partisan du Bloc Québécois – présente Carney comme un menteur. Cette thématique a été utilisée
pour décrédibiliser le chef libéral tout au long de la campagne.