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Affaire Anep, Anaj/Khomri A., 2025

Date de création: 05-05-2025 18:33
Dernière mise à jour: 05-05-2025 18:33
Lu: 49 fois


JUSTICE- ENQUÊTES ET REPORTAGES- AFFAIRE ANEP. ANAJ/KHOMRI A., 2025

© Salima Tlemçani/El Watan, lundi 5 mai 2025

Le pôle financier près le tribunal de Sidi M’hamed, à Alger, a poursuivi, dimanche 4 mai 2025, l’examen de l’affaire relative à la gestion de l’Agence nationale des loisirs et de la jeunesse (Analj) et de l’Agence nationale d’édition et de publicité (Anep). 

Les auditions avaient commencé mercredi dernier, avec les cadres dirigeants de l’Anep , dont Abdelkader Khomri, jugé pour «abus de fonction», «octroi d’indus avantages», «dilapidation de deniers publics», «blanchiment d’argent et enrichissement illicite», tandis que les trois autres cadres, Lazahri Labter, directeur de l’édition, Ahmed Boucena, ancien PDG et ancien DGA, ainsi que Labsi, directeur des finances et de la comptabilité, sur lesquels pèsent trois chefs d’inculpation, à savoir «abus de fonction», «dilapidation de deniers publics» et «octroi d’indus avantages». 

Lors de son audition, Lazhari Labter a expliqué qu’à son arrivée à l’agence, il a trouvé une convention d’achat de 10% des actions de la maison d’édition Hachette et des droits d’édition, en précisant que Abdelkader Khomri, alors PDG de l’Anep, l’a chargé de l’édition. 

Selon lui, le choix de sa personne «ne reposait pas sur le copinage, comme l’a déclaré Ahmed Boucena l’ancien PDG de l’Anep, mais sur mon profil de journaliste, écrivain et poète». Il a affirmé avoir édité «tous les livres dont les droits d’édition ont été achetés, alors que l’Agence était connue beaucoup plus pour la publicité. Elle n’a jamais fait de l’édition» et a ajouté : «Lorsque je l’ai quittée, des dizaines de livres d’auteurs majoritairement algériens et étrangers ont été édités. Il y a des éditions de 1000 ouvrages seulement, mais lorsqu’il s’agit d’auteurs de renom, comme Ahlam Mosteghanemi, Amine Maalouf ou encore Rachid Boudjedra, le nombre est de loin plus important 

Selon lui, «le livre est une longue chaîne», précisant : «Ce n’est pas à mon époque que le préjudice  a été causé, puisque la plupart des livres ont été édités, soit 256 en trois ans. Le reste était en master, c’est-à-dire en format CD, et prêt à être édité. Cela n’a pas été fait, parce que Boucena a, dès sa nomination en tant que PDG, gelé l’édition. Après mon départ, les 8 directeurs qui m’ont succédé n’ont pas poursuivi la tâche. J’ai sauvé l’édition de beaucoup de titres en prorogeant le délai d’échéance pour qu’ils soient édités Il a expliqué que «le livre est un produit lent» et «qu’il y a un grand problème de distribution», avant que le juge ne l’interrompt : «Acheter des droits d’édition pour les revendre à bas prix, n’est-ce pas une perte ?» Labter : «Mais bien sûr que c’est une perte. C’est Boucena qui en est responsable. Il a donné une instruction verbale en disant que le livre ne rapporte pas, suivie d’une autre instruction, cette fois-ci écrite, dans laquelle il dit il faut arrêter le livre 

Appelé à la barre, Abdelkader Khomri a nié tous les faits et affirmé qu’en 1999, lorsqu’il a été désigné à la tête de l’Anep, la politique de l’Etat était basée sur la levée du monopole sur la publicité. «A cette époque, l’Algérie était en négociation avec l’OMC et parmi les 14 conditions que celle-ci lui a imposées, il y avait la levée du monopole de l’Etat. Cela a provoqué un tarissement des ressources publiques. Les travailleurs ne percevaient pas leurs salaires. J’ai demandé une réflexion pour une éventuelle alternative. 

Lors d’une réunion, à laquelle Boucena en tant que directeur général adjoint, le représentant du Holding, et d’autres responsables et moi-même avons pris part, des décisions ont été prises et le procès-verbal a été signé par Ahmed Boucena, en tant que directeur général adjoint de l’Anep. Parmi celles-ci, la création  de 4 filiales et le Conseil d’administration les a toutes entérinées. Avec la filiale AME (Agence messagerie express), nous voulions régler le grand problème de distribution des journaux. Elle a commencé de zéro et réussi l’exploit de recruter 1500 travailleurs. Il y a eu aussi la messagerie bancaire, un succès qui a permis d’engranger des milliards de dinars par an. Cette filiale fonctionne à ce jour Le juge : «Parlez-moi plutôt des filiales qui n’ont pas réussi.» 

Khomri : «J’y arrive. La filiale AME est une réussite, tout comme l’ACS (agence de communication et de signalétique) Ipsofine n’a pas réussi parce qu’elle était censée faire les sondages électoraux et cette activité n’était pas autorisée Le juge : «Pourquoi ne pas l’avoir dissoute en temps opportun ?» Le prévenu : «J’étais déjà parti en 2004. Elle a été créée en 2002. Je ne peux dissoudre une entreprise, une année ou deux ans après sa création. Le conseil d’administration n’a pas demandé sa dissolution. Une augmentation de son capital a été effectuée, après mon départ, en 2006 et en 2008 

Le juge : «Quelle est la filiale qui a été dissoute sans raison ?» Khomri : «TDA Internet. Elle n’a pas réussi parce qu’il n’y a pas eu d’entente. TDA, ne nous a pas donné de raison. Le capital de l’Anep, plus d’un million de dinars a été restitué à la banque Interrogé sur l’achat des droits d’édition auprès de la maison Hachette, Khomri est revenu sur le contexte du début des années 2000, marqué par l’organisation du Salon du livre et la nécessité de tisser des relations avec de grandes maisons d’édition. «Nous avons été approchés par la Maison Hachette qui n’est pas des moindres. Elle voulait un protocole d’accord dans l’édition du livre», a-t-il déclaré avant que le juge ne le ramène à Dar Al Farabi et lui demande s’il avait des relations personnelles avec celle-ci. Khomri : «Mes relations avec elle sont purement professionnelles. 

A l’époque, chaque jour, Al Ahram consacrait un édito contre l’Algérie. Notre objectif avec Al Farabi est d’avoir une tribune dans le monde de l’écriture arabe et ramener le maximum de maisons d’édition arabes en Algérie pour le Salon international du livre pour qu’elles nous aident à être plus visibles 

Pour ce qui est du nombre des titres, il a répondu qu’il était «bien étudié» avant de rappeler qu’à l’époque «les maisons d’édition françaises nous refusaient les livres parce qu’elles considéraient que ce marché en Algérie, lui appartenait. Pour nous, Dar Al Farabi avait de bonnes relations directes avec d’autres maisons d’édition, ce qui nous a poussés à conclure avec elle un protocole d’accord, selon les besoins stratégiques et en coordination avec l’autorité politique du pays. L’Anep était sous le regard direct de la Présidence 

Pour Khomri, «Le nombre important de livres a été édité et vendu», mais l’expertise, at-il dit, «est restée entre il a acheté et n’a pas vendu, et non pas qui n’a pas édité et qui n’a pas vendu. En 2002, j’ai revu les délais d’expiration des droits d’édition qui expirent en 2005. Je les ai prorogés de 5 ans. J’ai quitté mon poste en 2004 et laissé un successeur. Je ne suis pas responsable»

Le juge : «Qui en est responsable ?» Khomri : «Boucena. Ce ne sont pas des accusations. Les faits qui le prouvent. Les titres que j’ai laissés et dont les droits d’édition ont été achetés, étaient prêts à être édités mais lui a décidé de tout geler. C’est lui qui a augmenté le capital d’Ipsofine pas moi». «Hachette est une des plus grandes maisons d’édition». 

Le juge a rappelé au prévenu que le protocole d’accord avec Ipsofine a été signé en 1999, alors qu’il était PDG, mais Khomri a précisé : «II a été signé en début 2000, où il y avait une nouvelle vision, celle d’être actionnaire puis, il y a eu en 2002, une consultation financière qui précisait que l’Anep ne peut être avec une société étrangère qui capitalise par une industrie. Nous n’avons pas créé une nouvelle entité, nous avons acheté des actions de l’entreprise. Le juge : «C’est vous qui aviez signé la prorogation des délais d’expiration…» 

Khomri a confirmé et expliqué que c’était «à titre préventif». Mais le magistrat réplique : «Vous avez prorogé les délais parce que vous n’avez pas exécuté le contrat.» Khomri a contesté et cite pour preuve les rapports «sans réserve» du commissaire aux comptes. 

Le juge l’a interrogé sur l’achat des actions de la maison d’édition Hachette. 

En réponse, le prévenu a rappelé qu’à l’époque, le gouvernement avait décidé d’ouvrir le marché du livre scolaire au privé national et étranger. «Hachette qui est une des plus grandes maisons d’édition mondiale était intéressée. Nous nous sommes rapprochés d’elle avec l’accord des plus hautes autorités. 

L’expertise estime que le prix d’achat des actions était élevé, mais sans préciser sur quelle base repose ce constat. La même chose pour le prix de cession. Nous avons acheté sur la base d’un protocole qui nous permet, une fois dans le capital, d’avoir l’exclusivité de l’édition et de la diffusion de millions de livres. Il est impossible de trouver une entreprise aussi expérimentée qui nous permet d’éviter des erreurs dans l’édition du livre scolaire que nous avons vécues dans le passé. C’est tous ces paramètres qui ont aidé à opter pour cette participation dans le capital. L’Anep est une société politico-socio-économique. Rien ne se fait sans l’accord de l’autorité concernée

  
 
NOTES COMPLEMENTAIRES :Le juge a demandé au prévenu si le prix d’achat des actions était élevé ou non. «J’ai été invité à prendre part à la réunion du CA et Boucena était secrétaire de séance. Le CA a voté unanimement la décision et le procès verbal. Moi, je n’ai fait que signer. Nous avons découvert que le prix était élevé, parce que l’ouverture du marché au privé n’a pas été exécutée. Mais si elle l’avait été, ce montant aurait été multiplié par mille Le magistrat lui a demandé d’expliquer cette affaire d’achat de journaux étrangers. Khomri a déclaré qu’il y a eu « des décisions présidentielles que l’Anep a exécutées ». Selon lui, le problème a surgi lorsque le Premier ministre de l’époque a déclaré qu’il n’avait pas fait de commandes. «J’ai écrit un rapport adressé aux plus hautes autorités.» Entamées très tard dans la journée de mercredi, l’audition des prévenus liés à l’Analj, s’est poursuivie hier, avec la comparution d’une dizaine de sociétés en tant que personnes morales pour des passations de marchés en 2014, dans le cadre de l’organisation du Festival de la jeunesse et des loisirs. Des conventions antidatées et des prix surestimés. La dizaine de sociétés auditionnées hier se sont défendues de la même manière. Elles ont expliqué avoir été approchées par l’Analj pour des prestations en dehors des procédures, et lorsqu’elles ont demandé le paiement, ce dernier leur a été refusé faute de documents. Une situation régularisée par la suite, avec effet rétroactif, pour bon nombre d’entre elles et pour certaines elles ont perdu leurs dus. La première société, est une imprimerie, qui a été sollicitée pour confectionner 1715 badges et 3000 affiches pour un montant de 1,31 million de dinars, mais dont le responsable ne se rappelle pas s’il y a eu négociation ou non sans oublier qu’il avait rayé son registre de commerce juste après l’opération, «faute de travail». Une autre société a été sollicitée pour un grand nettoyage de la Foire et un autre, quotidien, durant 70 jours, du même espace, pour un montant de 6 millions de dinars, sans que sa prestation ne soit payée. Même scénario avec une société, gardiennage, a obtenu un marché de 23 millions de dinars pour la sécurisation du stade du 5 Juillet et de l’espace d’Al Hamma, mais l’Analj n’a pas payé le prestataire. «Mes 250 agents de sécurité n’ont pas été payés et je découvre que l’agence rémunère en espèce le personnel. C’est du jamais vu. Puis j ai reçu virement de 3 millions de dinars sans être informé», a t-il déclaré. Une  société de matériel sportif a vendu, pour 52 millions de dinars, près de 12000 sacs avec des équipements de sport, à l’Analj dont seulement «5000 ou 6000 ont été distribués» a déclaré le représentant en disant qu’il n a pas été payé. «J’ai demandé les paiements à plusieurs reprises mais je n’ai pas eu de réponse. Il a fallu que je les menace de poursuites pour qu’ils me convoquent. Mais c’était pour me demander de baisser les prix de 30 ou 50%. J’ai refusé», a-t-il expliqué. Une agence de tourisme a obtenu des marchés de 56 millions de dinars, pour des colonies de vacances dans neuf wilayas. Pour la représentante de l’agence, il n’y a pas eu de cahier des charges pour négocier les prix. «Nous avons fait une offre, que l’Agence a acceptée. Le paiement n’a  été effectué qu’en 2015» a expliqué la représentante. Le juge : «Il a fallu que Khomri revienne en tant que ministre signer les conventions à des prix plus élevés que ceux du marché…»  La prévenue a nié en affirmant : «Si je le connaissais, je n’aurais pas attendu autant d’années.» Le juge : «Vous lui avez vendu ou acheté un appartement ?» La prévenue : «Je lui ai vendu un bien. Cela n’a aucune relation av