SOCIETE- PRATIQUES- CUISINE ALGÉRIENNE /KARANTIKA
Avril 2025 : Selon le guide gastronomique international TasteAtlas, la karantika, ce
flan doré à base de pois chiches si populaire dans les rues algériennes, vient
d’être sacrée meilleure street food de la planète. Une reconnaissance majeure pour ce
plat traditionnel oranais, apprécié pour sa simplicité, son goût unique et sa
dimension profondément populaire. Dans ce même classement, un autre trésor
algérien, la mahjouba, se distingue également en
se positionnant à la 41e place mondiale, confirmant le rayonnement
croissant de la cuisine algérienne traditionnelle sur la scène internationale.
La karantika — aussi connue
sous les noms de garantita, karantita
ou calentica — est bien plus qu’un simple en-cas de
rue. C’est un plat de mémoire, né dans les ruelles d’Oran, dont l’origine remonte
à l’époque coloniale. Selon une légende locale, la recette aurait vu le
jour en 1703, dans le fort de Santa-Cruz, alors occupé par des soldats
espagnols. Pris au piège d’un siège et à court de provisions, ces derniers
auraient broyé les restes de leur réserve de pois chiches, les mélangeant à de
l’eau et du sel pour en faire une pâte qu’ils firent cuire… donnant naissance à
la « calentica », littéralement
« petite chaude » en espagnol.Depuis,
la recette a évolué, mais l’essence reste la même : farine de pois
chiches, eau, huile, sel, parfois enrichie d’œufs, et toujours relevée
de cumin, ingrédient magique qui exalte ses saveurs. À Oran, on la prépare
dans sa version la plus simple. À Alger, on y ajoute des œufs pour plus de
texture. À Mostaganem, elle est souvent dégustée pendant le Ramadan avec la
chorba ou la hrira.
L’un des grands atouts de la karantika,
c’est son accessibilité. Vendue chaudement enveloppée dans un morceau de
pain, elle se déguste pour quelques dinars seulement — parfois moins de 50
DA. Présente sur tous les trottoirs d’Algérie, des grands boulevards d’Alger
aux quartiers populaires d’Oran, elle fait partie du quotidien de millions
d’Algériens. Étudiants, travailleurs, enfants, anciens : tout le monde
connaît ce goût réconfortant, souvent associé à l’enfance et aux souvenirs familiaux.On la trouve dans les
marchés, les coins de rue, les plages ou encore près des lycées et des
universités. Le rituel est immuable : une généreuse portion dans un pain, une
pincée de sel, du poivre, du cumin, parfois de la harissa
et le tour est joué.
Cette distinction par TasteAtlas
est bien plus qu’un simple classement. Elle symbolise une reconnaissance
internationale du savoir-faire culinaire algérien. Elle
récompense une culture ancestrale, transmise de génération en génération,
souvent dans l’ombre d’autres cuisines méditerranéennes plus médiatisées. Le
succès de la karantika et de la mahjouba
prouve que la cuisine populaire peut rivaliser avec les plus grandes tables, à
condition d’être valorisée.La
karantika, humble, généreuse, ancrée dans la réalité
du peuple, incarne tout ce que la cuisine peut transmettre : l’histoire d’un
territoire, la créativité face à l’adversité et l’amour du vrai goût. En se
hissant en haut du classement mondial, elle ne devient pas seulement une star
culinaire : elle rappelle que les racines algériennes sont solides, savoureuses
et fièrement portées par ceux qui les font vivre, jour après jour, dans les
rues et les foyers du pays.