HISTOIRE- COLONISATION-
RÉPRESSION/ ENTRETIEN BENJAMIN STORA (HISTORIEN FRANÇAIS)
En 1959, dans les monts
constantinois, des Algériens ont été brûlés vivants par du napalm utilisé par
l’occupant français. C’est ce qu’a rappelé l’historien français dans un
entretien accordé à nos confrères de Canal Algérie (fin mars 2025) . «En 1991, a précisé l’historien
-note : né en Algérie, à Constantine) j’ai réalisé un documentaire
intitulé les Années algériennes, dans lequel d’anciens pilotes français
témoignent qu’ils ont utilisé des armes chimiques, à savoir du Napalm contre
des Algériens à Constantine». «Ces pilotes parlent
d’ailleurs d’Algériens qui ont été d’ailleurs brûlés vivants», a poursuivi
Stora. L’historien français a révélé, depuis plusieurs années déjà, «qu’en Algérie, les Français ont été les premiers à faire
des bombes au napalm un usage régulier, y compris contre des villages». Pour
Canal Algérie, Stora considère que s’il y a forte polémique, aujourd’hui, sur
l’utilisation prohibée des armes chimiques par la France coloniale en Algérie,
cela s’explique notamment par le fait que les générations qui entrent en scène
ont un grand désir de connaissance. À titre indicatif, la France coloniale a
commencé à utiliser les armes chimiques contre les populations algériennes, en
1830, et que la première utilisation de ce type d’armes avait fait au moins 760
victimes. En 1845, au moins 1.000 personnes de la tribu d’Ouled
Ryah (Mostaganem) ont été tuées par asphyxie dans une
grotte. Outre les centaines de cas d’utilisation d’armes chimiques, ce ne sont
pas moins de 800 villages qui ont été détruits au napalm par l’armée coloniale,
qui a également fait usage de 800.000 tonnes de TNT déversées sur plusieurs
régions du pays. La vérité sur ces crimes odieux, d’autres massacres abjectes
et d’autres violences multiformes, commis par la France coloniale en Algérie a
fini par éclater au grand jour. L’opinion française, si elle a mis du retard
pour connaître toutes ces vérités, cela est dû notamment au fait « qu’en
France, on ne veut pas valoriser le courant anticolonialiste qui est pourtant
le plus vieux courant de l’histoire française», a
expliqué Benjamin Stora. «Il y a peu d’intellectuels
français qui sont engagés sur les questions anticolonialistes», a-t-il appuyé,
lors de son interview accordée à Canal Algérie. «Pour
la société française, accepter l’indépendance de l’Algérien c’était accepter la
fin de la guerre et ce n’est pas faire un examen critique sur ce qu'était
réellement le colonialisme», a-t-il regretté. Benjamin Stora a affirmé, par
ailleurs, qu’Emmanuel Macron est «le président français
qui est allé le plus loin dans la reconnaissance des crimes commis par l’armée
coloniale pendant la Guerre d’Algérie». Entre autres crimes de l’État français
reconnus officiellement par son président, Emmanuel Macron, l’historien a cité
les assassinats de Larbi Ben M’hidi, d’Ali Boumendjel et de Maurice Audin.
Benjamin Stora s’est dit satisfait, en outre, du fait qu’il y ait en France «une plus grande ouverture d’archives», sous la présidence
d’Emmanuel Macron. À une question sur les Accords d’Évian, qui ont fin à 132
années de colonisation française et permis à l’Algérie de recouvrer sa
souveraineté et son indépendance arrachées de haute lutte, Stora a estimé que
les clauses de ces accords ont bien cadré la question de la mobilité des
personnes entre l’Algérie et la France.