HISTOIRE- PERSONNALITES- AMIROUCHE AIT HAMOUDA (COLONEL ALN)
Le colonel Amirouche Ait Hamouda (1926-1959), figure emblématique de la Guerre de
libération nationale, chef de la wilaya III historique, était un leader
charismatique et un fin stratège qui avait acculé l’armée coloniale française
durant la Révolution de Novembre 1954.
Les témoignages de moudjahidine (dont plusieurs
sont aujourd’hui décédés) qui étaient sous son commandement dans la wilaya III
historique dont il avait pris la tête à partir de juillet 1957, évoquent
unanimement un chef militaire charismatique, réputé être un fin stratège d'une
grande rigueur, attirant sur lui les foudres de l’armée coloniale.
A ce propos, le défunt moudjahid Hamou Amirouche a écrit dans son livre "Akfadou : un an avec le colonel Amirouche" que Si
Amirouche faisait preuve d’une grande rigueur morale qui était nécessaire pour
"soutenir le combat jusqu'au bout. Au fil des mois, à mesure que
j'apprenais à le connaître, j'ai compris que sans justice et rigueur morale,
aucune cause ne peut triompher".
Djoudi Attoumi note dans son ouvrage "Le colonel Amirouche,
entre légende et Histoire", qu’après le Congrès de la Soummam (20 août
1956), les critères de responsable étaient connus : "ne pouvait être
responsable qui veut ! En plus des qualités militaires, il fallait posséder des
qualités morales, avoir de la détermination, du courage et un esprit de
sacrifice", et Si Amirouche les avaient toutes.
Aussitôt aux commandes de la wilaya III,
le colonel Amirouche, appelé également le Loup de l'Akfadou,
"sillonna périodiquement toute la Kabylie pour réorganiser, dynamiser les
zones et les régions, en insufflant une nouvelle stratégie, une nouvelle
dynamique aux unités combattantes".
Ce travail de restructuration a permis à
la wilaya III de comptabiliser en 1958 un effectif de 28 compagnies, toutes
équipées d’armes de guerre et dont le colonel contrôlait personnellement les
activités militaires, insistant sur la récupération d’armes dans les combats,
poursuit-il.
Pour motiver les moudjahidine, il eut
l’idée de décorer ceux qui se distinguaient au combat. Il décernait ainsi
"une médaille du courage" pour tous les hauts faits d’armes, la
récupération d’armes, la capture de prisonniers, entre autres et "les
actes de bravoure étaient toujours cités en exemple par lui, créant ainsi une
émulation entre les unités combattantes", rapporte Djoudi
Attoumi dans son livre.
En outre, Amirouche fût à l’origine de
la création du bataillon de choc de la wilaya, des compagnies de choc au niveau
des zones et des commandos de choc au niveau des secteurs autonomes.
"Cette force de frappe donna à la wilaya
III la suprématie sur le terrain et entraina une paralysie de l’armée française
lui faisant subir des revers humiliants"."Cette
année 1958 marqua l’apogée de l’armée de libération nationale (ALN) qui déploya
une intense activité militaire aux quatre coins de la Kabylie", poursuit-il
dans son ouvrage.
Dans une vaine tentative d’étouffer la
Révolution, la même année (1958), l’armée coloniale renforça son dispositif
dans la wilaya III en y implantant 546 postes militaires dans le but de la
quadriller, tout en lançant, en parallèle, sa politique de terre brûlée qu'elle
nommait "politique de pacification", en brûlant, détruisant et rasant
des centaines de villages et en vidant des douars entiers de leurs habitants.
"Pour faire face à ce déferlement
de soldats, Amirouche arrêta son propre plan, cette stratégie consistait à
préparer des stocks pour six mois de ravitaillement, de médicaments,
d’habillement, à creuser des casemates pour camoufler les provisions, et en
ordonnant l’éclatement des unités combattantes en groupes de 10 hommes...".
Des actions militaires étaient
organisées à travers tout le territoire de la wilaya III, où les moudjahidine,
motivés par leur chef, multiplièrent embuscades, accrochages, enlèvement de
postes militaires, entre autres.
Ces opérations constituaient "le
programme des activités quotidiennes exigées par le colonel Amirouche",
selon le témoignage de Djoudi Attoumi
qui nota que "pour l’armée française, un climat d’insécurité totale régna
désormais en Kabylie et elle ne se déplaçait, dans la région, que par convois
escortés de blindés et d’avions".
Parmi ces actions militaires il énuméra
dans son livre une longue liste d’opérations dont la "plus
spectaculaire" était l'attaque, le 4 février 1958, par les moudjahidine de
la Zone 2 de la Wilaya III, du poste militaire D'el Horane
au village Hammam Dalaâ dans la wilaya de Msila.
L'important armement enlevé de ce poste
comprenait 35 armes individuelles, 7 mitrailleuses 30 US, 7 mitrailleuses 12/7,
2 mortiers et un lot important d'armes et de munitions. En outre, 14 soldats
français furent prisonniers, dont le lieutenant Ollivier Dubos.
Il y a eu aussi, l’attaque du 20 août
1958, au lieudit "Les trois chemins" près de Sidi Aïch
(Bejaia), contre une unité de l'armée française qui fut anéantie et une
douzaine d'armes récupérées, l'embuscade d'Allaghen
(20 armes récupérées), l’embuscade près du poste lazouzene
(Azefoun, Tizi-Ouzou) (une vingtaine d'armes
récupérées), les batailles de Yakourene (Tizi-Ouzou)
le 31 octobre 1957 et d’Iamourène (Akbou, Bejaia) le 28 juin 1958, entre autres.
Le colonel Amirouche est tombé au champ
d'honneur le 29 mars 1959, aux côtés du colonel Si El Haouès,
à "Djebel Thameur" aux environs de Bousaâda, après une âpre bataille.
Déjà de son vivant, il était devenu une
légende dont les femmes chantaient la grandeur, les mérites et les victoires
sur l’ennemi. De nos jours encore, les vieilles femmes se souviennent et
fredonnent une chanson, parfois les larmes aux yeux, en souvenir de ce géant,
témoigne-t-on.