COMMUNICATION- FORMATION CONTINUE-PRESSE/
PLAGIAT JOURNALISTIQUE EN LIGNE
©Kamel Benelkadi/El Watan,
26 mars 2025
Dans
l'ère numérique où l'information circule à une vitesse fulgurante, les journaux
font face à un fléau grandissant : le plagiat en ligne. De nombreuses
plateformes reprennent, réécrivent et diffusent des articles de presse sans
autorisation, souvent en utilisant l'intelligence artificielle (IA).
Cette pratique s'apparente à une forme
de «piratage intellectuel» et menace l’écosystème
médiatique. Alors que les journaux investissent dans la production d’articles,
certains sites web récupèrent ces contenus, les modifient et les republient
sans en créditer les auteurs. Grâce à l’essor de l’intelligence artificielle
(IA), cette réécriture automatisée permet à ces plateformes de contourner les
lois sur le droit d’auteur tout en profitant du travail des journalistes.
Ce phénomène n’est pas nouveau, mais il
a pris de l’ampleur. Une récente enquête du journal Libération et du site Next,
sortie le 6 février intitulée «Faux rédacteurs, vrais
profits : comment l’intelligence artificielle parasite l’info», a démontré que
produire de l'information est un véritable métier : ça coûte cher, il faut
payer les journalistes qui mettent du temps à enquêter, à écrire, il faut aussi
des photographes et des éditeurs qui corrigent et vérifient l'exactitude des
articles. Il est notamment écrit : «Une nouvelle ruée
vers l’or se déroule sur Internet.
Des entrepreneurs rusés, profitant des
coûts dérisoires et des performances de l’intelligence artificielle générative,
inondent actuellement le web de petits ‘’sites d’actualités’’ où sont publiés,
de manière automatisée, des contenus tantôt paraphrasés, tantôt plagiés, quand
ils ne sont pas simplement inventés.»
Cette guerre va plus loin qu'une simple
opposition entre deux formes de rédaction : l'une journalistique et l'autre IA.
Google a été contacté pour leur fournir une liste des sites qu'ils avaient
détectés comme générés par IA, en attendant que la firme fasse le grand
ménage.
Ses sites avaient, il y a encore peu,
besoin de nombreux rédacteurs pour alimenter leurs pages, mais l’IA générative
leur offre désormais une manière plus rapide et surtout beaucoup moins onéreuse
de produire du contenu, avec l’apparence de l’authenticité, selon le site 20
minutes.
«La
véritable information n'est pas magique, elle nécessite de faire des
interviews, partir en reportage, rencontrer les professionnels du secteur,
discuter avec les chercheurs, lire des rapports, développer des contacts,
passer de longues heures à croiser les sources puis à écrire. Elle est
onéreuse, soumise à des contraintes de temps et de place, elle est faillible et
toujours améliorable. Mais elle est précieuse»,
déclare Laurence Defranoux, rédactrice-reporte à
Libération.
Un impact
direct sur la visibilité
Le
plagiat en ligne porte un coup dur aux journaux, notamment sur le plan
financier, et les médias algériens ne sont pas à l’abri. En détournant
l’audience et les revenus publicitaires, ces sites web fragilisent la presse
traditionnelle.
De nombreux médias, déjà en difficulté
face aux mutations numériques, voient leurs ressources s’amenuiser, mettant en
péril leur pérennité. C’est du moins l’analyse de Hamid Guemache,
cofondateur et directeur de TSA, qui affirme qu’il y a «des
sites internet qui se contentent de voler les contenus fabriqués par d'autres
journaux, comme El Watan, TSA, El Moudjahid, El Khabar, etc. Ils réécrivent les articles produits par
d'autres journaux sans autorisation. Le problème, c'est qu'ils abusent et ne
produisent aucun article original».
Pour lui, «ce
sont des sites qui n'ont aucune existence légale et font de la concurrence aux
journaux qui dépensent de l'argent pour produire des articles, des interviews,
des reportages. Ce qui est inacceptable du point de vue déontologique et
éthique journalistiques.
D'autant que les moteurs de recherche
les mettent en avant au détriment des vrais journaux qui ont des charges
sociales, salariales, patronales importantes, ce que ces sites n'ont pas». Outre l’impact économique, le plagiat des articles
nuit à la crédibilité de l’information.
Les versions réécrites sont souvent
altérées, simplifiées, voire déformées, ce qui favorise la propagation de
contenus biaisés ou inexacts. Par ailleurs, la reproduction massive des mêmes
articles par différentes plateformes contribue à «une
uniformisation de l’information».
Le vol de contenu journalistique a aussi
des répercussions directes sur les journalistes eux-mêmes. Ces derniers, qui
consacrent du temps et des efforts à enquêter et à rédiger des articles, se
retrouvent dépossédés de leur travail sans aucune reconnaissance ni
compensation.
De plus, la presse, qui dépend largement
des abonnements et des revenus publicitaires, subit une concurrence déloyale de
la part des «agrégateurs de contenu».
En reprenant leurs articles sans
autorisation, ces sites compromettent leur viabilité économique et contribuent
à la disparition de nombreuses publications. Mais il faut préciser que le plus
grave est que les contenus plagiés parviennent à s'imposer dans les classements
de recherche de Google, reléguant automatiquement les articles originaux des
médias en seconde position.
Le plus gros inconvénient, c'est que ça
peut entraîner une baisse de trafic, donc automatiquement une baisse de
revenus. Moins de visiteurs signifient moins de personnes exposées au contenu
et aux publicités. Actuellement, les médias algériens reconnus sont quasi
absents de la recherche Google sur l'Algérie.
Le moteur de recherche met en avant «un mélange de plagiat et de fake news», note un éditeur.
De plus, cette pratique provoque une «confusion» pour
les lecteurs qui ne savent plus identifier les sources fiables. Le but de ces
sites est de générer du trafic et de s’attirer ainsi des revenus publicitaires.