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France/Ecole Journalisme Paris/Rachat par investisseurs (2025)

Date de création: 02-02-2025 17:32
Dernière mise à jour: 02-02-2025 17:32
Lu: 52 fois


COMMUNICATION- ETRANGER- FRANCE/ECOLE JOURNALISME PARIS/ RACHAT PAR INVESTISSEURS (2025)

© https://www.nouvelobs.com/media,  22 janvier 2025

Le rachat de l’Ecole supérieure de Journalisme de Paris par un groupe d’investisseurs, dont Bernard Arnault et Vincent Bolloré, est, pour les signataires de cette tribune – plus de 650 étudiants en journalisme, de 26 écoles ,centres ,  instituts....... spécialisés en journalisme –, une « nouvelle expression de la subordination de l’indépendance journalistique à des intérêts économiques, politiques et idéologiques », face à laquelle un front commun est demandé.

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Nous, journalistes en formation, dénonçons le rachat de l’Ecole Supérieure de Journalisme (ESJ) de Paris par un consortium de milliardaires conservateurs.Le rachat de l’ESJ Paris par un groupe d’investisseurs, comprenant Bernard Arnault (propriétaire du « Parisien », des « Echos » et de « Paris Match »), Rodolphe Saadé (BFMTV, « la Provence »), Vincent Bolloré (Canal+, Europe 1, CNews, « le Journal du Dimanche »…), la famille Habert-Dassault (« le Figaro »), Stanislas et Godefroy de Bentzmann (fortune estimée à 700 millions d’euros) ainsi que Pierre Gattaz (500 millions d’euros), soulève de graves inquiétudes quant à l’avenir de la formation des journalistes et à l’indépendance des médias en France.Ce raid sur la plus vieille école de journalisme au monde est une attaque contre la profession, et ce dès sa formation. Aurons-nous la garantie du respect de la déontologie journalistique alors que certains propriétaires précédemment cités permettent la diffusion de contenus fréquemment épinglés par l’Arcom [le régulateur de l’audiovisuel] ? Aurons-nous la garantie du respect de l’indépendance des étudiant·es dans leur apprentissage du métier et dans l’exercice de la profession en sortie d’école ?Par cette tribune, nous affirmons notre ferme condamnation face à l’ingérence de ces grandes fortunes dans le contenu éditorial des médias qu’elles possèdent. Les exemples récents en témoignent de manière flagrante et inquiétante. CNews, anciennement iTélé, a pris un virage réactionnaire depuis son rachat par Vincent Bolloré en 2016. Le directeur de la rédaction de « la Provence », appartenant au milliardaire Rodolphe Saadé, soutien affirmé d’Emmanuel Macron, a été suspendu après une « une » jugée « anti-Macron ». Le directeur de la rédaction des « Echos » a été « débarqué » par Bernard Arnault, patron de LVMH et actionnaire principal du média, après la publication d’articles qui « auraient déplu à l’actionnaire »selon la Société des Journalistes [du quotidien économique].Ce rachat est une nouvelle expression de la subordination de l’indépendance journalistique à des intérêts économiques, politiques et idéologiques. Cette intrusion dans les rédactions ne vise pas le profit. Il s’agit d’utiliser les médias pour asseoir un projet politique conservateur et réactionnaire. La concentration médiatique, déjà problématique en France, s’intensifie. Aujourd’hui, selon le journal « Libération », huit milliardaires et deux millionnaires contrôlent 81 % de la diffusion des quotidiens nationaux. Cinq milliardaires détiennent 57,2 % des audiences des chaînes télévisées généralistes et 47,6 % de celles des radios nationales généralistes.

Etudiant·es signataires de cette tribune, nous voulons alerter sur l’impact que pourrait avoir un tel rachat sur la confiance qu’a le public envers les médias. Si, selon le dernier sondage « la Croix »-Kantar, 56 % des Français·es considèrent que ces derniers ne sont pas indépendants « aux pressions de l’argent », alors quel signal ce rachat envoie-t-il à un public déjà méfiant ? Comment garantir une information « de qualité, complète, libre, indépendante et pluraliste », comme l’énonce la Charte d’Ethique professionnelle des Journalistes de 1918, dans ce contexte ?Ce rachat franchit un cap en s’attaquant directement à la formation des journalistes. Par cette tribune, nous condamnons l’entreprise capitalistique et réactionnaire que les membres de ce consortium mènent sur le secteur médiatique. Nous y voyons la volonté de former des journalistes soumis·es à l’agenda politique et économique clairement assumé par certains de ces milliardaires. La nomination de Vianney-Marie Audemard d’Alançon, entrepreneur proche des milieux conservateurs, à la présidence de l’ESJ Paris illustre cette ambition. Son objectif est de former des journalistes « non-wokes, pro-entreprises et économie de marché »rapporte « Libération ». Une telle orientation trahit l’héritage dreyfusard de cette école et menace d’en faire un vecteur d’idéologies racistes, classistes, sexistes et queerphobes. Autrement dit : une idéologie d’extrême droite.

Nous, étudiant·es en journalisme, appelons à un sursaut de notre profession et de la société civile pour protéger l’indépendance des médias. Ce front commun doit se traduire par la mise au ban de toute institution scolaire dont la volonté des propriétaires est d’influencer le débat pour préserver leurs intérêts politico-économiques, la sanction irrévocable et systématique par l’Arcom des médias qui ne respectent pas les principes fondamentaux du journalisme, par l’instauration de lois pour réduire la concentration médiatique et garantir l’indépendance des rédactions.Nous appelons également toutes les institutions médiatiques et éducatives à s’unir – à l’image des salarié·es mobilisé·es du groupe Bayard – pour défendre une information libre et une formation journalistique intègre.Nous, futur·es journalistes, refusons de céder à cette emprise et affirmons notre engagement en faveur d’un journalisme digne, éthique et indépendant.